qui la mettent au premier plan. M. de Féraudy a dessiné avec sa finesse coutumière la physionomie du vieux de Ferney, un bonhomme sentimental et avisé, type un peu conventionnel mais si sympathique ! Les autres rôles sont très convenablement tenus.
Sous ce titre : le Marchand de bonheur, M. Kistemaeckers nous conte la déplorable histoire d’un jeune millionnaire. C’est un grand malheur d’être le fils d’un papa très riche ; on devrait se le dire, entre fils de papas pauvres ; cela contribuerait beaucoup à adoucir les conflits sociaux. La pièce de M. Kistemaeckers, — dont je m’empresse de constater le succès, — est destinée à mettre en lumière cette vérité désolante pour quelques-uns, mais consolante pour beaucoup d’autres. Je ne dirai pas que cela se dévide comme les couplets d’une complainte ; cela se déroulerait plutôt comme une série d’images d’Epinal, très perfectionnées par le moderne cinématographe.
Le jeune millionnaire fréquente les loges d’actrices. Lieu de séduction, mais aussi de perdition ! L’actrice s’appelle Monique Méran. Ce soir, qui est un soir de première, elle est en plein triomphe. Des flots d’admirateurs lui offrent des bouquets, des bonbons, des hommages. Le jeune René Brizay, connu dans le monde de la haute noce sous le sobriquet du « Petit Chocolatier, » lui offre son cœur et autre chose avec. Monique Méran accepte, non sans avoir fait quelques manières, qui ajoutent au don de sa personne l’apparence flatteuse d’une conquête. En cette soirée mémorable, René Brizay, qui a la veine, aura fait deux heureuses. L’autre, ce n’est pas, comme dans une poésie connue, la mère de l’aimable personne ; c’est une de ses petites camarades, une humble figurante, Ginette Dubreuilh, que son étoile a conduite dans la loge de Monique, au moment précis où il y pleut de l’or. Comme elle se plaint de sa triste condition de gamine jetée au vice par la misère, le Petit Chocolatier lui jette à la figure un petit hôtel tout meublé, un crédit chez la couturière, chez la corsetière, chez la modiste et divers autres fournisseurs, sans préjudice d’un compte ouvert dans un établissement de crédit des plus sérieux. N’en jetez plus, René !… Ahurissement de l’enfant de Montmartre et du spectateur.
Le jeune millionnaire est sujet à être « tapé » dans les grands prix. Je m’excuse de l’emploi de ce vocable que je considère comme trivial. Mais on m’assure qu’il a été consacré par un fréquent usage. René Brizay, d’un geste magnifique, a tendu à un aviateur en quête de fonds un chèque de cent mille francs. L’aviateur en profite pour