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venger. Il arriva de Varzin le 31 août pour étudier sur place l’usage qu’on pouvait faire de ce document et la réponse qu’on y devait donner. Le 3 septembre, un Conseil des ministres se réunit, et Bismarck ensuite redevint campagnard.

Dans ce Conseil du 3 septembre furent définitivement arrêtées les grandes lignes de la lettre personnelle que Guillaume, ce jour-là même, expédiait au Pape. Guillaume releva, dans la lettre pontificale, deux assertions qu’il n’acceptait pas. Sur de faux rapports, disait-il à Pie IX, vous avez cru et affirmé que je n’approuvais pas la politique religieuse de mon gouvernement : ce n’est pas possible, puisque au contraire j’y donne ma sanction. En vertu de votre foi, continuait-il, vous avez cru et affirmé que quiconque est baptisé appartient à la juridiction du Pape : « Votre Sainteté doit savoir que la croyance évangélique, professée par moi, par mes ancêtres et par la majorité de mes sujets, ne permet point d’admettre un autre médiateur auprès de Dieu que Notre-Seigneur Jésus-Christ lui-même. » Guillaume se plaignait : il dénonçait le parti politique qui s’efforçait par de sourdes menées de troubler la paix religieuse, la résistance ouverte que le haut clergé catholique opposait aux lois, le concours prêté aux ennemis de l’ordre, dans la plupart des pays, par les prêtres et les fidèles de l’une des confessions chrétiennes ; il affirmait sa ferme décision de maintenir, dans son Etat, l’ordre et la loi, aussi longtemps que Dieu lui en donnerait la force. C’était là pour lui un devoir royal, dont plus tard Dieu lui demanderait compte, et auquel il voulait être fidèle, lors même qu’il fallait, pour le remplir, poursuivre les serviteurs de l’Église.

La plume impériale, d’un bout à l’autre de ce message, s’était astreinte à une certaine courtoisie hautaine : les formules de politesse, les périphrases d’une patiente longueur, attestaient le calme imposant, d’autant plus redoutable, avec lequel l’Empereur adressait au Pape deux démentis bien nets, une accusation formelle, une raide et froide menace.

Le même jour où cette lettre était signée, le ministère prussien, déférant à la demande que lui avait présentée M. Schulte au nom des communautés vieilles-catholiques, décidait de reconnaître, sur le territoire prussien, la juridiction épiscopale du professeur Joseph Hubert Reinkens, excommunié depuis deux ans par l’Eglise romaine, nommé évêque le 4 juin par ses