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qu’oratoires, ressuscitaient dans la mémoire des paroissiens le souvenir des dogmes qu’ils avaient pu oublier, ou des lois morales qu’ils avaient voulu oublier. Des missions de Jésuites ou d’autres religieux survenaient parfois périodiquement : elles étaient pour la paroisse l’occasion de communions générales auxquelles presque personne ne manquait. Nous avons, pour la période s’étendant entre 1850 et 1872, les comptes rendus détaillés de toutes ces missions : on y voit des foules affluer en quête de lumières et de grâces ; des villages se vider une ou deux fois par jour et déverser sur la paroisse voisine, où prêchaient les missionnaires, le flot de leurs habitans ; on y voit des missionnaires prêchant en plein air, pour évangéliser la foule que l’église ne pouvait contenir ; d’autres, cernés du confessionnal par des rassemblemens de pénitens qu’aucune attente ne lassait ; et d’interminables rangs de communians, à jeun parfois depuis la veille au soir, s’échelonner, à des heures tardives de la matinée, depuis la place du village ou depuis le fond du cimetière, saluer au passage le vieux et gigantesque saint Christophe, qui, près du seuil de l’église, semble veiller sur Dieu ; et puis, lentement, montant vers l’autel, s’acheminer jusqu’à Dieu. Telles étaient les scènes de calme et robuste ferveur dont l’Eglise d’Allemagne donnait le spectacle constant.

Ce peuple fournissait des vocations. Des calculs faits en 1865 établissaient, pour chaque diocèse d’Allemagne, la proportion entre le chiffre des prêtres et celui des habitans : on trouvait un ecclésiastique à Augsbourg pour 388 habitans ; à Eischtaedt, pour 387 ; à Hildesheim, pour 396 ; à Osnabruck, pour 560 ; à Paderborn, pour 650 ; à Cologne, pour 775. Si l’on additionnait prêtres, moines, et religieuses, on rencontrait à Paderborn une vocation pour 33 habitans ; à Trêves, une pour 56 ; à Münster, une pour 61 ; à Cologne, une pour 213. Bien que les populations catholiques, généralement pauvres, profitassent beaucoup moins de l’enseignement secondaire que les populations protestantes, il y avait dans l’ensemble de la Prusse 96 prêtres pour 100 000 catholiques, et seulement 60 pasteurs pour 100000 protestans. Enfin, dans les vingt années qui précédèrent le Kulturkampf, les congrégations religieuses s’étaient si puissamment épanouies, que, dans le seul diocèse de Cologne, le nombre des nonnes, qui n’était en 1850 que de 240, atteignait 2 726 en 1872.

Mais les attraits du sanctuaire et du cloître n’éloignaient