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La querelle
de
Forbin et de du Guay-Trouin


Pendant la guerre de la Succession d’Espagne, la marine française, qui avait à lutter contre les flottes alliées de l’Angleterre, de la Hollande et du Portugal, resta sur la défensive. Ce n’est pas qu’elle eût été presque anéantie à la bataille de la Hougue, comme quelques historiens l’ont écrit. Cette bataille, que Tourville livra contre un ennemi deux fois supérieur, sur l’ordre formel de Louis XIV mal informé, ne fut en réalité désastreuse que pour les prétentions de Jacques II au trône d’Angleterre.

Nous y perdîmes une quinzaine de vaisseaux ; mais un vigoureux effort fut fait immédiatement par nos chantiers de construction pour les remplacer, et même pour en augmenter le nombre. Les États abrégés de la marine, ces merveilleux manuscrits destinés au Roi, que l’on conserve précieusement aujourd’hui rue Royale, montrent qu’au 1er janvier 1696, 13 vaisseaux de premier rang, 6 de second rang, 11 de troisième rang et 7 de quatrième rang, avaient déjà été reconstruits depuis 1692, l’année de la Hougue. Au commencement du XVIIIe siècle, notre marine était donc encore très forte ; en 1704, une armée navale de 50 vaisseaux, sans compter les frégates, les galères et autres bâtimens légers, put être mise en mer sous le commandement du comte de Toulouse, amiral de France, et livrer devant Malaga une bataille indécise contre une flotte anglo-