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d’administration de la « Société des phosphates tunisiens » de Kalaa-Djerda, fait de fréquens séjours à Tunis. Cette mine exporte annuellement 335 000 tonnes, avec 1 000 ouvriers, dont 350 Italiens et des indigènes, qui ont bâti auprès de l’exploitation le petit village de Magniville. Les produits passent de Tunis à Milan, où des usines transforment les phosphates en per-phosphates et les disséminent dans toute l’Italie, pour le fumage des terres. En récompense de l’activité donnée à cette exploitation, le gouvernement a nommé M. Magni chevalier de la Légion d’honneur.

D’autre part, les mines de fer de Djebel-Slata et Hamema fournissent 300 tonnes de minerai par jour. Auprès de la station de Slata, les Italiens ont créé le village de Todrosville, du nom de l’ingénieur italien qui accéléra le développement minier dans la région.

A l’inverse des ouvriers, les agriculteurs se fixent au sol. C’est vers 1896 qu’ils ont afflué pour défricher les terres. À cette époque, la colonie était essentiellement agricole, et malgré sa transformation continue en région industrielle, l’agriculture y occupe encore un rang très honorable. En 4905, on y cultivait 500 000 hectares en blé, produisant 2 millions d’hectolitres. Les. 10 millions 1/2 d’oliviers donnaient 240 000 hectolitres d’huile. En 1908, 16 450 hectares plantés en vignes ont produit 345 000 hectolitres de vin.

L’agriculture réclame des capitaux et de la main-d’œuvre. On importa des capitaux français. Quant à la main-d’œuvre, le gouvernement songea d’abord aux indigènes. Mais les Arabes, aussi méfians que peu laborieux, tapis sous leurs gourbis, derrière des haies de cactus épineux, ne bougèrent point. Ce fut avec enthousiasme que nos colons clairsemés accueillirent le flot de paysans italiens, dont le labeur opiniâtre allait redonner à ces terres, après vingt siècles d’abandon, leur ancienne fertilité.

Ces agriculteurs, arrivés en grand nombre des bois de citronniers siliciens, n’ont pas, fort heureusement, subi la fascination de l’Éden transatlantique, comme ceux qui vont demander à l’Amérique du Nord une réussite problématique, un travail incertain. La désillusion les saisit bientôt, dans cette fourmilière où une population tumultueuse parle une langue monosyllabique, sans analogie avec la leur, sous un climat