plutôt encore qu’il ait eu d’instinct le secret d’une forme élégamment mesurée, le fait est qu’une traduction de ses livres, — au contraire de ceux de M. Boleslas Prus ou de M. Sienkiewicz, ses glorieux aînés, — ne risquerait pas de nous choquer par un manque trop absolu d’équilibre dans la composition. Les plus longs même de ces livres ne sont jamais encombrés : l’air et la lumière y circulent librement, et l’extrême abondance des pages ne nous apparaît pas plus gênante que, par exemple, dans un roman d’Alexandre Dumas. Seule, peut-être, la nature trop « polonaise » des sujets constituerait un obstacle à leur acclimatation parmi nous. M. Reymont, comme je l’ai dit, tâche bien à « humaniser » les sentimens et tout le caractère de ses personnages : mais je crains que l’effort qu’il y emploie ne suffise pas à nous affranchir d’une certaine inquiétude, au spectacle de tels modes particuliers d’imagination ou de volonté qui, dans ses romans, semblent parfaitement naturels et possibles aux compatriotes de son Joseph Pelka. En tout cas, l’expérience vaudrait d’être tentée ; et puisque, depuis la mémorable aventure du succès de Quo Vadis, — que je persiste à considérer comme fâcheuse pour l’introduction définitive, chez nous, des véritables chefs-d’œuvre de M. Sienkiewicz et de ses confrères, — les Polonais ne cessent pas de vouloir nous initier au brillant mouvement de leur littérature, assurément ils ne sauraient trouver un romancier mieux fait pour nous devenir familier et cher que l’auteur des Paysans, de la Terre promise, et de cette tragique histoire d’un jeune « rêveur » enseveli sous l’écroulement de ses rêves.
T. DE WYZEWA.