- Suscription :
- Monsieur Alfred de Vigny,
- rue des Écuries-d’Artois,
Paris. Lundi 23.
Sur votre demande, dont je suis bien touché, je vous envoie, mon cher docteur Noir, le bulletin de ma santé qui est sensiblement meilleure. Je suis vos ordonnances par amour pour moi et par respect pour vous, je devrais dire aussi par amour de mon médecin : ce ne serait pas trop pour reconnaître tant de bontés et de visites volontaires. Vous me voyez touché de celle d’hier soir à un point que je ne saurais dire.
A vous,
A. BRIZEUX.
La dernière ligne de cette lettre semble faire allusion à quelque bonne nouvelle apportée, à quelque service rendu. Peut-être trouverait-on l’explication juste en remarquant que, peu de jours après, le 1er août, la Revue des Deux Mondes publiait des vers de Brizeux ? À ce moment, Vigny avait tout crédit sur Buloz et il était bien homme à s’en être servi pour faire agréer ce collaborateur nouveau, qui demeura, depuis ce jour, l’un des poètes attitrés de la Revue.
Et, d’autre part, un post-scriptum de ce billet laisse entendre assez clairement qu’à peine de retour, Brizeux s’est proposé d’écrire ou peut-être a déjà écrit une critique de Stello : mais où la produire ? Sainte-Beuve, à qui Brizeux, peu au courant de ses dispositions hostiles, s’était tout d’abord adressé, répond « que la littérature du National est toute politique et que les convenances du journal lui ont paru telles à lui et à Magnin qu’ils n’ont pas espéré de les concilier avec leur amitié et leur admiration pour M. de Vigny. » « Carel » (sic) sera « sondé » une deuxième fois, et l’on verra également « si Nisard ne renonce pas à Stello, » S’agirait-il ici de se faire ouvrir la porte des Débats ? Brizeux, l’année d’après, y publiait deux études en prose : « De mon côté, ajoutait-il encore, je récris à mon correspondant du Temps. » Si l’article sur Stello ne parut pas, ce ne fut pas faute de tentatives et d’efforts pour y intéresser les journaux de la bonne marque.
Dès qu’il put sortir de son lit, Brizeux partit pour sa province. Il y arriva juste à temps pour assister à l’agonie de sa