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par lesquels les gardes de la Reine à bout de forces les avaient salués, lorsqu’ils avaient reconnu dans le brouillard l’uniforme bien connu des troupes algériennes, retentissaient à travers l’Angleterre.

L’article qui concerne les Zouaves parut dans la Revue des Deux Mondes quinze jours avant l’article sur les Chasseurs à pied. Cuvillier-Fleury, qui avait surveillé l’impression et relu les épreuves, parlait d’un succès éclatant, puis il se reprochait d’appliquer à une œuvre si originale et si forte le mot banal qu’on applique aux œuvres littéraires qui ont réussi. Le prince méritait mieux qu’un succès d’auteur. Son travail produisait une impression profonde et saine. On y sentait l’inspiration du plus pur patriotisme, aucune trace de parti pris, la volonté de s’élever en dehors et au-dessus des passions politiques, de ne poursuivre d’autre objet que la glorification de l’armée française. Quelques militans auraient voulu profiter de la circonstance pour provoquer une grande manifestation en l’honneur de la famille d’Orléans. Le prince et Cuvillier-Fleury s’y opposèrent formellement. Ils entendaient laisser à l’œuvre son caractère de haute impartialité. Le Duc d’Aumale n’avait pas écrit pour donner satisfaction à ses partisans. Il avait cédé au besoin de saluer ses anciens compagnons d’armes, ces admirables soldats d’Afrique qui, loin de la patrie, dans des conditions si dramatiques, tenaient entre leurs mains le drapeau de la France.

Dans Les Zouaves, c’est l’ancien colonel du 17e léger, c’est le troupier qui parle. Les Chasseurs à pied sont une œuvre moins vibrante, moins pittoresque, mais d’une plus haute portée L’auteur y aborde un ordre d’idées plus élevé, les conceptions des grands généraux, les principes de l’art de la guerre, les créations de Gustave-Adolphe, de Turenne, du prince Eugène, de Frédéric II, de Napoléon. Il montre à la suite de quelles études et de quelles réflexions le maréchal Soult en 1833 et le Duc d’Orléans un peu plus tard furent amenés à introduire dans l’armée française ce qui existait déjà dans les armées étrangères, des corps de fantassins plus mobiles que les régimens de ligne, des compagnies de francs-tireurs se distinguant de l’infanterie ordinaire par le port de la carabine et par un uniforme approprié à leur destination. L’idée première était de donner à un groupe de fantassins une arme d’une portée supérieure et une mobilité plus grande. C’est d’après ce principe qu’une série