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longtemps sur le haut fleuve se seraient adjugé les nouvelles terres en profitant de l’influence acquise sur place pour décourager les initiatives. La France, l’Allemagne, l’Angleterre, les États-Unis ont tout intérêt à ce que la Belgique ne précipite point les étapes et permette ainsi à leurs habitans d’arriver en temps utile au Congo. Il faut éviter à tout prix de voir se substituer au monopole de l’État un nouveau monopole de fait au profit de quelques négocians belges.

L’intérêt des puissances se confond ici d’ailleurs avec celui des indigènes. Qui ne voit le danger qu’il y aurait à ouvrir à tout venant des territoires peu ou point du tout occupés ? Qui ne comprend à quels lamentables excès, l’âpreté au gain des blancs pourrait exposer la population ? L’occupation méthodique du territoire est le prélude nécessaire du nouveau régime.

Enfin, la mise en œuvre du système soulèvera des difficultés de tous genres qu’il est impossible de prévoir et que seule la pratique fera connaître. L’expérience acquise dans la région à ouvrir le 1er juillet prochain et qui est la plus facilement accessible, servira dans les autres.

Cette première région comprend le tiers du pays, soit, dans la sphère économique des ports de l’Atlantique, le Bas-Congo, la majeure partie de la zone frontière de l’Afrique équatoriale française, la boucle du grand fleuve et le bassin du Kassai ; dans la sphère de l’Afrique du Sud et de l’Afrique Orientale, le Katanga et les régions riveraines des lacs Tanganyka et Kivu ; enfin, le négoce soudanais pourra dès maintenant opérer dans les territoires avoisinant le Nil.

Dans ces régions, les colons devront se munir d’un permis de récolte annuel dont le prix est fixé à 250 francs, s’il s’agit de récolter le caoutchouc ou le copal, et gratuit dans les autres cas. Nul permis pour les indigènes à moins d’exporter eux-mêmes les produits. Comme ce cas sera exceptionnel pendant longtemps, on peut dire qu’en fait, les natifs récolteront librement les produits et les vendront aux exportateurs, soit que ceux-ci aient une factorerie fixe, soit qu’ils aient une patente de marchand ambulant. La récolte du caoutchouc ne pourra se faire que d’après les méthodes indiquées : coupe ou saignée des lianes ou des arbres, suivant les cas[1].

  1. Décret du 22 mars 1910.