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Ayant ainsi défini ses projets sur le domaine exploité en régie, le ministre des Colonies annonçait que pour le territoire concédé à des compagnies ou réservé au chemin de fer dit des Grands Lacs, « le Gouvernement examinerait ultérieurement s’il n’y avait pas lieu de reprendre, d’accord avec les intéressés, de nouveaux arrangemens. »

C’est la rupture avec le passé. Sans juger celui-ci, la Belgique comprend que l’heure est venue de changer les méthodes. Si l’habileté de l’Etat indépendant à ne se réclamer que de ses droits de propriétaire, lui avait permis de soutenir juridiquement qu’il n’entravait point le commerce, en fait, sa politique économique avait raréfié la matière commerçable au point de décourager le négoce. Le gouvernement belge maintient le principe de la domanialité des terres vacantes et de leur attribution à l’Etat, mais propriétaire généreux, il en abandonne les produits. Placé à la tête d’un pays riche et industrieux, jouissant d’une situation financière excellente, il n’a point les préoccupations budgétaires du jeune Etat qu’il s’est annexé.

Aussi l’accueil fait aux projets du gouvernement fut-il excellent. La Presse belge de toutes nuances, les membres les plus écoutés des divers partis politiques, MM. Beernaert et Woeste à droite, MM. Huysmans et Hymans à gauche, y ont applaudi et se sont déclarés prêts à donner leur appui au Ministère. Il n’est pas jusqu’au socialiste M. Vandervelde qui ne se soit déclaré satisfait des réformes.

La discussion du budget et la publication successive des dispositions législatives qui les consacrent, permettent aujourd’hui d’en préciser l’économie.

C’est en trois étapes, commençant respectivement au 1er juillet de chacune des années 1910, 1911 et 1912, que la colonie ouvrira son domaine à l’exploitation libre. Ce procédé n’est point un moyen dilatoire de maintenir partiellement l’ancien régime ; il s’inspire au contraire du souci d’assurer au système nouveau une efficacité complète.

L’intérêt même du commerce exige que l’on évite les mesures trop hâtives, de manière à laisser aux particuliers le temps de s’outiller, de se pourvoir de terres, de créer des établissemens.

Si le gouvernement belge avait eu la folie d’ouvrir en même temps tout le territoire congolais, les étrangers eussent été les premiers à pâtir de cette situation. Les Belges déjà établis depuis