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générations antérieures ; il tend de plus en plus à appliquer les ressources dont il dispose à ses besoins de bien-être et de luxe. De plus, la race est intelligente, éducable, sensible aux enseignemens qui lui viennent de l’école, du journal, du livre, aux conseils que lui donne le médecin, aux exemples que lui offre la ville.

Ces trois faits expliquent les progrès de l’hygiène physique. Ils sont considérables en ce qui touche le logement, le vêtement et la nourriture[1].

On ne connaît plus la petite chaumière, bâtie en pisé, avec deux chambres, l’une pour l’homme, l’autre pour les animaux ; on ne connaît plus la vieille métairie, avec une vaste pièce unique, servant à la fois de cuisine, de salle à manger et de dortoir, éclairée seulement par la porte et la faible lueur qui descend de la large cheminée. Il n’y en a plus qu’une dans ma commune, et elle ne tardera pas à disparaître, emportant le souvenir d’une couchée royale, celle d’Anne d’Autriche et de Louis XIII, surpris par un orage à mi-chemin entre Lectoure et Nérac, après le siège de Montauban.

Le type minimum du logement rural est la maison à trois pièces, l’une servant de cuisine, les deux autres de chambre à coucher. Bien des détails ont été améliorés ; la terre battue a été recouverte de carreaux ; la cheminée, le fourneau, l’évier sont mieux conditionnés. Beaucoup de maisons neuves ont un premier étage : on y voit apparaître, quoique timidement encore, des plafonds, des papiers sur les murs, des cheminées en marbre. Le mobilier est suffisant : chaque habitant a son lit et chaque convive son couvert. L’ancienne et fâcheuse promiscuité du lit et de la table a disparu. Les enfans se moquent quand on leur parle de l’éclairage d’il y a quarante ans : le careil, qui n’était que la lampe romaine à peine modifiée, et la chandelle de résine fixée au mur sous le manteau de cheminée par une pince en bois, petite chandelle jaune dont la lumière fumeuse était si faible que quand les femmes, qui tricotaient assises autour du foyer, voulaient compter les mailles sur leur aiguille, elles étaient obligées de se lever pour porter le tricot tout près de la flamme. Aujourd’hui une bonne lampe à pétrole suspendue au plafond

  1. Un Village de Gascogne au point de vue de l’hygiène sociale, par le docteur E. Labat. Communication au Congrès d’Hygiène sociale d’Agen. Agen, Imprimerie moderne, 1909.