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Cet exemple, mémorable entre tous, nous montre combien l’idée de la copropriété des proches parens fait partie de celles qui ont présidé à l’organisation des sociétés humaines. La tâche des législations positives a consisté à déterminer les droits de ces parens, et tout d’abord le degré auquel s’arrête la vocation héréditaire. On trouve à cet égard des solutions différentes selon les législations, avec une tendance chez les plus récentes à diminuer le nombre des parens successibles. Il ne serait pas téméraire de conclure de là à un relâchement des liens de famille, au moins en ce qui concerne les parens éloignés. L’individualisme moderne concentre de plus en plus sur les enfans et les petits-enfans l’affection du père et de la mère.

Le droit romain admettait la successibilité illimitée de tous les collatéraux qui pouvaient prouver leur parenté avec le défunt ; la loi de nivôse an II faisait de même. Les législations qui assignent une limite au droit de succéder le font de deux manières : 1° dans le système des parentèles, qui consiste à appeler hiérarchiquement les différens lignages issus du de cujus d’abord, puis de ses auteurs ou ancêtres, en arrêtant la successibilité à l’épuisement d’un lignage ; 2° là où l’on institue les héritiers selon la proximité de leur degré, en s’arrêtant à un certain degré.

Comme exemple du premier système, nous citerons le code autrichien qui exclut la septième parentèle, les lois des cantons de Zug et de Glaris qui font cesser la vocation héréditaire en l’absence de représentant de la quatrième, c’est-à-dire celle des arrière-grands-parens. Les législations qui appliquent la computation des degrés s’inspirent en général du système romain, qui compte les degrés nécessaires pour remonter du de cujus à l’auteur commun et redescendre ensuite jusqu’à l’héritier, tandis que le système canonique ne fait pas état de ces derniers : ainsi un cousin germain est au quatrième degré dans le premier cas, au second selon le comput canonique. En droit français, belge, hollandais, le dernier degré successible compté à la romaine est le douzième ; en Italie, en Portugal, le dixième ; à Genève, le huitième ; en Espagne, le sixième (code de 1889) : ce même chiffre se retrouve au Pérou, au Chili, en Argentine. Le projet de remaniement du code civil belge l’admet également Il n’y a guère que le code allemand qui ait maintenu la vocation héréditaire illimitée.