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de Drumann, de Duruy, de Mommsen, et les éloges prodigués à l’administration impériale. On peut même dire que plusieurs, parmi les plus célèbres histoires de Rome composées au XIXe siècle, n’ont été écrites qu’en vue du conflit engagé entre la république et la monarchie. Et c’est précisément pour cela que, la lutte entre ces deux principes politiques étant venue à s’affaiblir pendant le dernier quart du XIXe siècle, non seulement les histoires de Rome ainsi conçues vieillirent, mais encore maintes personnes se persuadèrent que l’intérêt porté jusqu’alors aux études romaines n’avait plus de raison d’être. « Nous sommes, dit-on, dans le siècle de l’électricité et de la vapeur. La tâche de notre époque, c’est de contenter la classe moyenne et la classe populaire, qui veulent, non des guerres et des révolutions, mais une existence plus sûre et plus commode ; c’est de travailler infatigablement à créer les prodigieuses richesses qui, seules, peuvent satisfaire les nouveaux désirs de multitudes si nombreuses. Une histoire ancienne, toute remplie d’expéditions militaires et d’entreprises politiques, est inévitablement devenue étrangère à un siècle qui a besoin de machines plus que de lois, de chimistes et de physiciens plus que de guerriers et de lettrés. » A quoi on ajoute encore que le latin qui, jusqu’au siècle dernier, restait une langue à demi vivante, s’est définitivement éteint au XIXe siècle, étouffé par le luxuriant développement des langues et des cultures nationales, enseveli sous les ruines de la puissance politique de l’Eglise, laquelle, pour l’idiome comme pour tant d’autres choses, avait continué l’Empire romain. N’est-il pas évident que la mort de la langue latine marque pour Rome le début d’une nouvelle, suprême et irréparable décadence ?

Et, de fait, lorsqu’il fut pratiquement démontré que, même au siècle de l’électricité et de la vapeur, c’était chose facile de réveiller l’intérêt qui s’attachait autrefois aux études romaines, la plupart de nos contemporains, pour s’expliquer à eux-mêmes ce singulier phénomène, l’attribuèrent à la remodernisation un peu violente, — louable, selon les uns, très blâmable, selon les autres, — que j’en avais faite. Mais il y a là une curieuse illusion, qui n’a pu trouver crédit, même auprès des historiens, qu’eu raison du petit nombre de gens qui, de nos jours, lisent avec attention les auteurs anciens. Tous ceux qui ont une connaissance approfondie de la littérature latine, savent que je n’ai