Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 57.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
ROME DANS LA CULTURE MODERNE[1]

En gravissant aujourd’hui, à la courtoise invitation du premier magistrat de la Ville, cette colline sacrée, pour y parler de Rome dans la culture moderne, j’éprouve l’émotion de celui qui, revenant après maintes années d’un hasardeux voyage, est joyeusement accueilli par une foule amie, au lieu même d’où, longtemps auparavant, il est parti seul ou presque seul. Que de souvenirs, à cette heure, remontent vers moi d’un vol léger, souvenirs du temps déjà lointain où je pris définitivement la résolution de risquer toute la fortune de ma vie dans l’entreprise d’écrire une nouvelle histoire de Rome ! Mais peut-être aucun de ces souvenirs ne m’est-il plus doux que celui des anxiétés, des incertitudes, des doutes qui, à l’instant du départ, se pressaient sur la route pour me retenir. « A quoi bon, me disais-je, écrire une nouvelle histoire de Rome ? Est-il à présumer que notre époque moderne, qui se rue vers l’avenir avec un si furieux élan, trouve, au milieu de cette course effrénée, le loisir nécessaire pour retourner la tête, ne fût-ce qu’une minute, et pour considérer un passé si reculé ? Le moment est-il réellement venu de l’écrire, cette nouvelle histoire de Rome ? Est-ce que l’histoire n’est pas entrée dans sa phase scientifique, et n’est-elle pas, en conséquence, tenue de préparer les nouvelles synthèses par une longue et minutieuse analyse ? »

Je vous avoue qu’à l’instant du départ je n’étais point en état de répondre à ces doutes avec précision et avec assurance ;

  1. Discours prononcé le 21 avril, sur le Capitole, à la commémoration du Natale Urbis, — Anniversaire de la fondation de Rome, — célébré par décision de la Municipalité.