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étoile bleue de la Lyre qui est, comme nous l’avons vu, entourée d’une immense atmosphère d’hydrogène. Parmi les étoiles encore plus chaudes dont on a mesuré les températures effectives, je signalerai, dans la constellation de Persée, trois étoiles (β, ε, δ) pour lesquelles on a trouvé respectivement 13 300°, 15 200° et 18 500°, et enfin λ du Taureau qui occupe jusqu’ici l’extrémité supérieure de cette échelle au bas de laquelle nous placions p de Persée, avec une température effective de plus de 40 000 degrés ! Bien entendu, l’exactitude des mesures n’est pas suffisante pour qu’on puisse garantir ces nombres à quelques centaines de degrés près. Il n’en est pas moins vrai qu’ils nous indiquent certainement un « ordre de grandeur » exact. Ces températures colossales dépassent d’ailleurs tout ce que nous pouvions concevoir.

On peut calculer que si, tout en conservant ses dimensions actuelles, notre Soleil avait la température de Véga, celle qui régnerait à la surface de la Terre serait, toutes autres choses restant égales, supérieure à 110° centigrades, c’est-à-dire que les liquides des organismes vivans étant au-dessus de leur température d’ébullition, la vie sous les formes que nous lui connaissons serait impossible sur la Terre. En réalité, lorsque le Soleil, dans le cours des transformations successives qui l’ont amené à son état actuel, a passé par la phase thermique où se trouve aujourd’hui Véga, la chaleur due à la masse en fusion qui constitue l’intérieur de la Terre n’avait certainement pas encore été réduite par le rayonnement à sa faible valeur actuelle. De tout cela nous pouvons conclure que l’apparition de la vie sur la Terre n’a certainement pu se produire que très longtemps après l’époque où le Soleil avait la température de Véga.


VI. — ÉVOLUTION CHIMIQUE DES ÉTOILES

Mais si nous étudions maintenant les particularités, spectrales des étoiles dont on a mesuré ainsi les températures, nous voyons que les plus chaudes sont précisément les étoiles où l’hydrogène et l’hélium sont prédominans et les métaux absens, tandis qu’à mesure que nous considérons les étoiles dont la température a été trouvée de plus en plus basse, nous voyons apparaître dans leurs spectres les raies de plus en plus nombreuses des métaux, pour aboutir avec ρ de Persée aux raies des corps composés