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REVUES ÉTRANGÈRES

LA PREMIÈRE VERSION DU WILHELM MEISTER DE GŒTHE


Gœthe. Wilhelm Meisters theatralische Sendung, par le professeur G. Billeter, un vol. in-8o, Zurich, librairie Rascher, 1910.


Si les journaux nous apprenaient tout à coup la découverte, absolument authentique, d’une tragédie perdue de Racine ou d’un roman de Balzac dont nous ignorions l’existence, voire de quelques chants inédits de la Légende des Siècles, certes nous accueillerions la nouvelle avec une surprise mélangée de plaisir : mais ni la surprise ni le plaisir ne revêtiraient sans doute chez nous le caractère passionné de la curiosité avec laquelle nous avons longtemps attendu, par exemple, l’apparition de la dernière comédie de M. Rostand. Nous apportons désormais, cela est trop sûr, un calme et un détachement singuliers à honorer la mémoire de nos grands écrivains nationaux, sauf le cas où leur souvenir nous est momentanément rappelé par l’exhumation de certains détails, plus ou moins scandaleux, de leur vie privée. Il en va tout autrement en Allemagne, et l’étroite communion du public entier avec le génie de ses poètes classiques vient de nous y être prouvée, une fois de plus, par l’attitude enthousiaste de ce public à l’égard de la rédaction primitive d’un roman de Gœthe qu’a récemment découverte, à Zurich, le professeur Billeter. Le fait est que l’annonce de cette heureuse trouvaille s’est aussitôt répandue à travers tous les pays de langue allemande ; et je ne crois pas que nul événement politique ou littéraire, depuis des années, ait causé une émotion comparable à celle que l’on a vue se