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d’obtenir justice, Boulotte commence par accepter. Mais bientôt, se reprenant et vaguement songeuse, elle hésite : « Et puis... peut-on savoir ce qu’il y a au fond du cœur des femmes... un autre sentiment peut-être. Il était superbe, le brigand, il était superbe tout à l’heure, quand il chantait : Amours nouvelles ! »

Et voilà comment la sœur aînée et joviale annonce et d’avance justifie, — oh ! dans une certaine mesure, — la sœur cadette, tragique et mystérieuse. Voilà comment les deux œuvres, rapprochées, s’éclairent, et nous font considérer, dans un même sujet, les deux faces, ou comme disait, — à peu près, — Bossuet, les deux extrémités des choses humaines.


Nous ne savons pourquoi la Société des Grandes Auditions de France a reçu les deux musiciens étrangers qui furent dernièrement ses hôtes, en des lieux favorables inégalement. La symphonie de M. Gustav Mahler eut la chance d’être exécutée au Châtelet. C’est au Trocadéro qu’on n’a pas entendu la suite symphonique Florence et la cantate sacrée Dies iste de don Lorenzo Perosi. La première des deux salles choisies est excellente. L’autre, depuis trente ans, outrage les oreilles et les yeux. Puisque, avec la Tour Eiffel et la Grande Roue, ses voisines, elle forme une part du trésor architectural de la troisième République, celle-ci devrait la réserver à ses cérémonies ou à ses comices : festivals politiques, populaires ou sociaux, assemblées générales de mutualistes, ou de ces autres confédérés que, par un pléonasme fâcheux, « Prévoyans de l’Avenir « on nomme. Et, dans l’intérêt de la musique, on écrirait sur les murs de l’affreuse rotonde : « Les musiciens n’entrent pas ici. »

Moins importante, beaucoup moins, que le Dies iste, la suite symphonique Florence est composée de trois morceaux. Le second et le dernier pourraient bien être les meilleurs. L’un a de la grâce mélodique et chantante ; le sentiment en est mélancolique, tendre, et l’orchestre mystérieux. On l’appellerait, si les deux mots se pouvaient associer, un lied, italien et le terme de « sympathie » en définirait assez le caractère. Le finale, brillant, sorte de saltarelle, a paru celui des trois morceaux où le style et le travail véritablement symphonique a le plus de part.

Le Dies iste n’est en aucune façon, pas plus par l’idée, ou le sujet, que par la grammaire, du même genre que le Dies iræ, Dies illa. Jour de miséricorde et non de colère, d’allégresse et non de douleur, le jour dont il s’agit est celui de la conception de Marie. Ce texte, ou cette