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Sainte-Vierge, cette attente de l’ange qui viendra, comme dans la journée initiale de la Rédemption, portant la fleur de lys, le culte naissant de « l’Immaculée, » le zèle, la passion de la Virginité, en ces temps de désordre et de corruption, tous ces traits si remarquables dans la mission de Jeanne d’Arc étaient esquissés dans la propagande et la prédication qui exaltaient les pèlerins du Puy.

La mère de Jeanne était-elle affiliée au Tiers-Ordre de Saint-François ? La coïncidence du pèlerinage avec le voyage de sa fille et surtout la rencontre, probablement préparée, avec le frère Jean Pasquerel, pourraient le faire croire. Un historien l’a même affirmé de Jeanne d’Arc. On pourrait prendre en ce sens le qualificatif de « béguine >‘qui lui fut appliquée par des contemporains[1]. Certains détails de son arrangement, — les cheveux coupés en rond, la vêture grise ou noire, — ont été signalés, ainsi que des actes de dévotion qui lui étaient particulièrement chers. Ces remarques ingénieuses ne font pas preuves. Mais ce qu’on ne peut pas nier, c’est l’affection de Jeanne d’Arc pour les ordres mendians.

Elle a dit, elle-même, au procès, qu’elle ne s’était jamais confessée qu’au curé du village, sauf, deux ou trois fois, à des frères mendians. Ce sont des frères qui l’entourent le plus souvent et, tout en écartant absolument l’idée émise par M. Siméon Luce que sa mission ait été en relation avec les « querelles de moines, » — dominicains contre franciscains, — il est difficile de la séparer de cette escorte pieuse parmi laquelle Dunois la revoit encore, quand il parle devant les juges de la réhabilitation. « Interrogé sur la conduite et le commerce de la Pucelle, il dépose qu’elle avait pour habitude, chaque soir, à l’heure des vêpres ou au crépuscule d’entrer dans une église et de faire sonner les cloches pendant une demi-heure. Elle rassemblait les religieux mendians qui suivaient l’armée et se mettait alors en prière tandis qu’elle faisait chanter par les mendians un Antiphone de la Sainte-Vierge. » (Procès, III, 104.)

Déclarations confirmées par celles de frère Jean Pasquerel :

  1. Morosini (t. III, p. 65 et aussi p. 92).