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Si abondantes qu’aient été les publications récentes sur l’histoire des ducs de Bourgogne, des recherches nouvelles dans leurs archives trop dispersées fourniraient aussi un précieux butin. La Bourgogne, puissance morte jeune, n’a pas rempli sa destinée. Sa courte et prodigieuse histoire s’est trouvée disloquée comme son territoire. On ne sait où la trouver, à Lille, à Dijon, à Bruxelles, à Paris, à Vienne. C’est un des plus beaux sujets d’études que présentent les annales de l’Europe. Après le travail de M. E. Petit, complétant ses prédécesseurs, les Dom Plancher, les Barante, après l’excellente Histoire de Belgique de M. Pirenne, il reste à poursuivre la tâche et à reprendre, par le détail, les points particuliers où le nœud se serre. Le jour où on aura révélé le fond des sentimens et le dessous des ambitions « bourguignonnes, » on aura donné la clef de l’histoire de Jeanne d’Arc.

Il serait désirable, enfin, que des études biographiques complètes fussent consacrées aux principaux personnages du drame et, tout d’abord, à Regnault de Chartres archevêque de Reims, qui a besoin, si j’ose dire, de se justifier, puis à l’évêque de Beauvais, Cauchon, dont le rôle n’a pas encore été étudié dans son ensemble[1] ; les rapports qui ont existé entre ces deux hommes, dont l’un était le métropolitain de l’autre, éclaireraient, probablement, les singulières machinations qui ont préparé l’échec de l’héroïne.

Peut-être de nouvelles recherches dans les archives du Parlement de Poitiers finiraient-elles par mettre sur la trace des procès-verbaux de l’enquête que les gens du Roi firent dans cette ville, quand la Pucelle fut soumise à leur examen par Charles VII. Les procès-verbaux n’ayant pas été produits au procès de réhabilitation, on en a conclu, un peu rapidement peut-être, qu’ils avaient été détruits. De tels documens ont la vie dure : on peut espérer encore qu’ils reparaîtront au jour.

On le voit, le champ qui reste à parcourir, sans parler de

  1. Il existe une étude distinguée de M. Sarrazin, Pierre Cauchon, juge de Jeanne d’Arc, Champion, 1901.