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n’ai jusqu’ici [pas] fait grand’chose, et il est impossible de faire autrement : on travaillerait sans cela sans discernement et tout à côté. Les beautés de tout genre sont ici les unes sur les autres et on est assommé de voir ; ce n’est que peu à peu que l’on revient de son étonnement et que l’on voit bien. Pour le tableau dramatique, nous le ferons à Paris, où j’aurai d’autre » moyens qu’ici en tout genre, mon atelier bien clos et fermé pour tout le monde, excepté Bartolini, comme vous pouvez le penser. Je serai près de vous, mes chers et bons amis, et cela ne contribuera pas peu à me faire accoucher d’un bel ouvrage. J’apprécie beaucoup et mettrai en pratique tout ce que ma bonne dame Forestier me dit touchant ce tableau. Je compte ici en faire les esquisses. Ce pays est si calme qu’on a le temps de réfléchir et penser. J’ai aussi trouvé le temps de lire une infinité de livres d’art et autres. J’en ai beaucoup appris et j’en ai extrait de très bonnes notes que je ferai mettre au net arrivé à Paris. M. Naudet fils a dû vous voir, et vous remettre certains petits dessins et vous parler beaucoup de Rome. Mais, chose que je vous demande en grâce, c’est de ne pas faire du tout attention et me pardonner l’indiscrétion que j’ai mise à accabler de tant de copies ma bonne Julie. Je me suis laissé aller et quand j’ai vu ma lettre de loin, à l’effet, j’ai vu qu’elle était indiscrète et exigeante. Je vous demande donc en grâce de réduire ces demandes à un seul petit croquis de mon portrait...

« Allons ! mon cher monsieur Forestier, un peu d’indulgence pour mes boutades ; je rétracte mes erreurs et demande pardon à ceux que j’ai pu mal soupçonner... J’irai revoir dans quelques jours le sénateur Lucien, et verrai comme il me parlera, soyez bien tranquille, ce ne sera jamais moi qui aurai tort avec lui, et, tout ce que vous m’en dites, j’en ferai [mon] profit. Je vous remercie bien de la visite que vous avez eu la bonté de faire pour moi à M. Girodet. Tout ce que vous m’apprenez est bien flatteur et consolant pour moi. J’ai lu, aussitôt votre lettre lue, et relue bien entendu, l’épître de Boileau à Racine. Mon cher Boileau ne me quitte pas ; il n’est pas de jour où je n’en lise quelques vers. Je remercie beaucoup M. Girodet du conseil qu’il ma donné ; je la saurai par cœur, cette épître, surtout où il fait sentir l’utilité que l’on peut retirer de la jalousie de ses ennemis et en particulier des bonnes et mauvaises critiques. Il faut qu’il y ait une grande analogie entre les arts et la poésie, car son