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les della Robbia. Le premier fut l’Italien Devers, venu de Turin pour émailler le monde, abondant en discours, moins heureux en œuvres, finissant, entre 185S et 1858, par deux grandes décorations en faïence colorée pour l’ancien Théâtre-Lyrique, d’ailleurs assez médiocres. Ulysse, de Blois, établi comme Avisseau sur les bords de la Loire et Jean, à Paris, reproduisaient un un peu mieux les effets des majoliques italiennes. D’autres, au lieu d’aller demander à l’étranger ses secrets, s’avisaient qu’on avait fait de fort belle faïence en France et qu’il serait beau de renouer une tradition interrompue. Le musée de Nevers était plein de belles poteries anciennes. Celui de Sèvres, en 1848, était aussi riche qu’aujourd’hui. Pourquoi ne pas continuer les ateliers de Moustiers, de Nevers, de Strasbourg, de Rouen ? C’est à quoi s’appliquèrent de vrais artistes comme Genlis et Rudhart à Bourg-la-Reine chez Auboin, comme Lessore, également à Bourg-la-Reine, chez Laurin.

Enfin, les carnations céramiques d’Extrême-Orient commençaient d’émouvoir les artistes. Les trouvailles de M. A. de Beaumont, qui revenait de Perse, décidèrent Collinot, le premier, à refaire des poteries orientales. Il commença ses recherches à Boulogne, par des poteries persanes, continua par des chinoises et des japonaises. Longuet tenta aussi des faïences persanes. Laurent Bouvier s’y appliqua, quelques années plus tard, avec un étonnant génie décoratif. Mais l’élan fut surtout donné par Théodore Deck, véritable artiste, potier pratiquant, infatigable chercheur. C’était un ouvrier de Strasbourg qui avait couru l’Europe à la recherche de la science et de l’art céramiques. Devenu contremaître à Paris, chez Mme Dumas, fabricante de poêles, il y avait connu l’Alsacien Reiber, Ranvier et Gluck. Reiber faisait les formes des terres cuites. Deck les émaillait avec des émaux persans : bleu turquoise, des pourpres sombres, des rouges écarlates, des bleus azurés. Puis il travailla pour son compte. En collaboration avec les peintres Hamon, Ranvier, Hermann, puis Bracquemond, rembûché dans un petit atelier du boulevard Montparnasse, où, chaque dimanche, des artistes venaient avides de nouveautés, Deck préparait les grands plats émaillés qui eurent un éclatant succès à Paris et à Londres en 1861. Enfin, Solon, de Sèvres, s’efforçait de rénover notre manufacture nationale, lorsque les Anglais, qui suivaient de très près le mouvement céramique français, notamment les