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II

1830 marque une date importante dans l’histoire du parlement anglais. La marée libérale monte et bat les murs de Westminster. L’esprit nouveau commence à pénétrer dans la Chambre héréditaire ; mais la majorité, fidèle aux vieilles traditions, défend pied à pied ses positions. Une première fois, en octobre 1831, elle rejette, par une majorité de neuf voix, le bill de Réforme, car elle sait que cette réforme fera disparaître les bourgs-pourris qui sont ses citadelles. On suggère au roi Guillaume IV qu’une promotion de douze ou quinze pairs libéraux annihilerait aisément cette petite majorité récalcitrante. Il s’y refuse et préfère employer la persuasion. Ce moyen réussit et, l’année suivante, le grand bill de Réforme est inscrit dans le Statute-Book. Désormais, la Chambre des Communes s’appartiendra à elle-même. Cependant il ne faudrait pas croire que les Lords aient perdu, à ce moment précis, leur influence sur les élections. Il faudra le scrutin secret (1870) et les remaniemens successifs des circonscriptions électorales pour atténuer encore cette influence, qui, à l’heure actuelle, demeure puissante. Après comme avant 1832, les fils de la noblesse viennent faire leur éducation politique ou se créer un nom dans la Chambre basse.

Examinons brièvement les pouvoirs qui restaient et qui restent encore à la Chambre des Lords, ceux qu’elle partage, à titre égal, avec la Chambre des Communes, ceux qu’elle détient seule, ceux, au contraire, qu’elle ne possède pas et dont la Chambre des Communes est exclusivement investie. Elle peut exercer le droit d’initiative en toute occasion, excepté en ce qui touche les lois financières, mais aucune des lois qu’elle propose et qu’elle vote ne peut recevoir l’assentiment royal et devenir définitive sans avoir été approuvée par l’autre assemblée. On lui reconnaît le droit d’initiative exclusif en ce qui louche sa constitution intérieure et ses privilèges. La loi de finances lui est soumise, chaque année, ce qui implique le pouvoir de la rejeter, mais celui de modifier telle ou telle clause de cette loi n’a jamais été reconnu à la Chambre des Lords par la Chambre des Communes et l’on s’en tient, à cet égard, à la jurisprudence de 1678, renouvelée, en 1861, comme on va le voir, à la suite