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l’indépendance de l’Allemagne. La France n’en doit prendre aucun ombrage... Le sentiment national de l’Allemagne satisfait, ses inquiétudes se dissipent, ses inimitiés s’éteignent. En imitant la France, elle fait un pas qui la rapproche et non qui l’éloigné de nous. Au Midi, l’Italie est mise en possession de tous ses élémens de grandeur nationale. Son existence modifie profondément les conditions politiques de l’Europe ; mais, malgré des susceptibilités irréfléchies ou des injustices passagères, ses idées, ses principes, ses intérêts la rapprochent de la nation qui a versé son sang pour l’aider à conquérir son indépendance... L’Autriche, dégagée de ses préoccupations italiennes et germaniques, n’usant plus ses forces dans des rivalités stériles, mais les concentrant à l’Est de l’Europe, représente encore une puissance de 35 millions d’âmes qu’aucune hostilité, aucun intérêt ne séparent de la France. »

L’Empereur croyait l’Allemagne entièrement satisfaite et bien disposée pour nous, l’Italie encore plus sympathique, et l’Autriche consolée de ses pertes en Italie et de son déclin en Allemagne par la délivrance de toutes préoccupations extérieures ! Il trouvait dans une Europe plus fortement constituée et plus homogène une garantie pour la paix du continent, sans aucun péril ou dommage pour nous. Il voyait se produire chez les peuples une poussée irrésistible pour se constituer en grandes agglomérations « inspirée par une sorte de prévision providentielle des destinées du monde. » S’élevant « au-dessus des préjugés étroits et mesquins d’un autre âge, » il ne pensait pas que la grandeur d’un pays dépendît de l’affaiblissement de ses voisins. Il se louait même d’avoir accepté le rôle de médiateur et de modérateur. « Il aurait, disait-il, méconnu sa haute responsabilité si, violant la neutralité promise et proclamée, il s’était jeté à l’improviste dans les hasards d’une grande guerre, d’une de ces guerres qui réveillent les haines de race et dans laquelle s’entre-choquent des nations entières... »

Cette circulaire, n’amena pas, — Napoléon le reconnaît lui-même, — les résultats espérés, et il fut forcé de répéter, le 18 novembre 1867, les mêmes assurances de paix et de satisfaction. « Il faut, dit-il alors, accepter franchement les changemens survenus de l’autre côté du Rhin et proclamer que, tant que nos intérêts et notre dignité ne seront pas menacés, nous ne nous mêlerons pas des transformations qui s’opèrent par les vœux