Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 56.djvu/836

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ces vieux-catholiques, qui faisaient ainsi leur entrée dans la politique ecclésiastique de l’Allemagne, doivent tout d’abord être étudiés : et puisqu’ils interviennent en quelque façon comme le troisième facteur du Culturkampf, nous devons, comme nous l’avons fait pour Bismarck et comme nous l’avons fait pour les nationaux-libéraux, remonter en arrière, afin de les mieux connaître. Leur histoire d’ailleurs était courte encore, au moment où Bismarck s’y inséra ; elle tenait tout entière en douze mois.

Le 21 juillet 1870, l’archevêque Scherr, rentrant à Munich, recevait en audience les professeurs de la faculté de théologie. « Nous allons donc de nouveau travailler pour la Sainte Église, dit-il à Dœllinger. — Oui, reprit le prévôt, pour la vieille. — Il n’y a qu’une Église, répliqua l’archevêque : il n’y en a pas une vieille et une nouvelle. » — « On en a fait une nouvelle, » maintint Dœllinger. Et, sur ce mot, les professeurs chargés d’instruire les futurs prêtres prirent congé du prélat. Entre l’épiscopat revenu de Rome et la « science allemande, » le premier contact était un choc.

Dœllinger craignait que, si la « science » se taisait, les « Jésuites » ne triomphassent ; il décida, dès la fin de juillet, quarante-deux universitaires laïques de Munich à déclarer publiquement que la liberté avait manqué au Concile, que l’unanimité morale avait fait défaut à ses décisions, que l’Écriture, que la tradition s’insurgeaient contre l’infaillibilité, et qu’à leur tour ils faisaient insurrection. L’Écriture, la tradition, n’avaient guère préoccupé jusque-là plusieurs des manifestans, dont l’incroyance était notoire.

Sur le Rhin, d’autres opposans firent écho. Deux professeurs de la faculté de théologie de Bonn, Dieringer et Reusch, rédigèrent une courte formule qui accusait le Concile de n’avoir été ni libre, ni unanime : elle fut votée dans une assemblée de laïques que groupèrent, dans la petite ville de Kœnigswinter, l’avocat Adams et le pédagogue Stumpf, puis reproduite dans la Gazette de Cologne, dont les colonnes furent ouvertes pour les adhésions ; en quatre mois, 1 359 signatures s’alignèrent.

Parallèlement aux laïques, les théologiens et les canonistes prenaient un rendez-vous ; Dœllinger le fixait à Nuremberg pour le 25 août 1870. Douze répondirent à son appel. Les philosophes Baltzer et Knoodt, qui ne pardonnaient pas à Rome d’avoir condamné Gunther, devaient naturellement accourir. À