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conservatrice de 272 voix est plus homogène que jamais : les dissidens libre-échangistes, à l’exception de deux, ont disparu. La majorité ministérielle, au contraire, reste divisée en trois groupes indépendans.

J’entends bien que les 40 voix ouvrières seront aussi fidèles au gouvernement que les 275 bulletins libéraux. Le Labour Party est contraint d’évoluer dans l’orbite du radicalisme. L’heure des grandes pensées et des rêves ambitieux est passée. Le parti ouvrier ne deviendra pas de longtemps le centre du mouvement démocratique. Peloton d’avant-garde, il doit se contenter de pousser, par la crainte d’une défection et par la menace d’une surenchère, les ex-libéraux dans la voie des réformes socialistes. Les résultats des dernières élections ont démontré au Labour Party la nécessité de la modestie et la vitalité du radicalisme. Dans 22 circonscriptions sur 26, où trois candidat* sollicitaient les suffrages, le porte-drapeau ouvrier est arrivé bon dernier. Dans 33 divisions, où les Labour Members engageaient la lutte pour la première fois, trois seulement se sont laissé convaincre. Et encore sur trois victoires, la première est due au retrait d’un libéral (Derby), et la seconde (Manchester) est compensée par un échec. En 1906, le Labour Party pose 50 candidatures et accroît son effectif de 25 voix. En 1910, il engage la lutte dans 78 circonscriptions et perd 5 sièges. S’il ne sort pas plus diminué de la bataille, c’est que le groupe radical-ouvrier. Liberal Labour, a disparu. Les 11 députés mineurs sont venus combler les vides faits dans les rangs par le dernier combat. Mais ces recrues nouvelles, qui appartiennent à la corporation la plus modérée de l’aristocratie ouvrière, travailleront à assagir le Labour Party. Eclairé par l’échec des candidatures indépendantes posées par les associations révolutionnaires, ligoté par la pénurie de ses ressources, irrité par le nouvel arrêt des Lords qui interdit aux syndicats de remplir sa caisse, le Parti ouvrier Constitue désormais l’aile gauche de la majorité radicale. Et lorsque ses membres ont accepté, quand les sièges furent répartis entre les nouveaux élus, de s’asseoir sur les bancs ministériels, leur décision est venue résumer, d’une façon visible, cette évolution politique.

Si les élections de 1910 ont rapproché les Labour Members d’un parti de jour en jour plus radical, — c’est en effet le centre qui a fait tous les frais des défaites électorales, — elles