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repoussé ou plutôt ajourné le budget possèdent 4 150 000 hectares, soit à peu près la cinquième partie de la surface du Royaume-Uni, Ce fait ne diminue ni leur capacité politique ni leur valeur sociale. Mais il facilite, autant que les discussions courtes et les salles vides, les accusations de partialité et les attaques des démagogues.

Jamais, depuis la campagne contre les droits sur les blés, un pareil déluge de paroles véhémentes, une pareille masse d’affiches violentes ne s’était abattue sur le Royaume-Uni. Les ministres ont donné l’exemple : « La terre d’Angleterre n’est pas faite pour les perdrix, mais pour les paysans ! » s’est écrié le Chancelier de l’Échiquier (Londres, 31 déc. 4909). M. D. Lloyd George a parlé de « ces ménageries de Pairs, qui ont visité presque tous les coins du royaume. Ils n’ont jamais tant travaillé de leur vie. Ils ne sont pas habitués à un pareil effort, a-t-il dit, et j’espère qu’ils pourront tenir bon... Mes Seigneurs, vous voulez une modification de notre système fiscal. Bien volontiers. Aujourd’hui les charges pèsent lourdement sur les commerçans et les ouvriers et ne touchent pas le propriétaire foncier. Vous voulez un changement dans notre organisation financière. Nous allons vous le donner. Ils vont avoir leur tour, et nous allons les mettre pour un temps au moulin de discipline. » (Londres, 4 janvier 1910.) M. Winston Churchill, cousin du duc de Marlborough, n’a pas voulu se laisser dépasser par le fils d’un paysan gallois : « La Chambre des Lords, a-t-il dit, n’a été tolérée, ces dernières années, que parce qu’on la croyait dans cet état comateux qui précède la désagrégation. Elle en est là aujourd’hui. Que cette assemblée, non représentative, non réformée, se mette en avant, réclame le droit de faire et de défaire les gouvernemens, allonge une patte gourmande sur les prérogatives du Souverain, et l’autre sur les privilèges anciens et primordiaux des Communes, voilà un spectacle que personne, il y a un an, n’aurait cru voir un jour. Il y a cinquante ans, pas un pair n’eût osé l’envisager. Et il y a deux cents ans, la question n’aurait pas été discutée, d’une manière courtoise, quoique passionnée, au cours d’une campagne électorale, elle aurait été réglée par des charges de cavalerie, par la marche irrésistible de piquiers bardés de fer. » (Peoples Rights, p. 27.)

Si tel a été le ton des ministres, on peut deviner quel a été celui des orateurs de moindre envergure. Quand les épithètes