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REVUE DES DEUX MONDES.


Ce lundi à 5 heures, 11 avril 1831.

Mon cher Général, je désire vous voir ce soir pour causer Belgique à fond avec vous et avec M. Perier à qui je viens de l’écrire aussi. Mon enrouement ne m’empêchera pas de vous bien développer mes idées à tous deux, quoiqu’il soit trop fort pour que je puisse aller au Salon, et encore moins au Bal de l’Opéra. Vous me trouvères donc quand vous voudrés, mais croyés moi, il faut voir clair dans ce que nous faisons, car l’affaire est sérieuse.

À ce soir. — L. P.


Ce mardi à 5 heures, 3 mai 1831.

J’ai lu vos dépêches, sauf celles de Rheinhard[1]qui ne pressent pas. Lises bien celle de Copenhague, et faites la lire à M. Perier. Il faut la méditer, je partage l’opinion de M. d’Eyragues[2], et la confidence Danoise mérite d’autant plus d’attention que, selon moi, elle est fortifiée par bien d’autres circonstances.

Il paraît clair que les contingens pour le Luxembourg vont être mis en mouvement sans qu’on attende notre assentiment. On dit déjà que celui de Danemark s’assemble à Altona et qu’il en repartira dans les premiers jours de mai. Ainsi tout cela sera sur le Rhin avant la fin du mois, et qui les payera ? Mon cher Général, ceci devient grave, et je suis pressé d’en parler avec M. Perier et vous. Tachés de venir me voir ce soir tous les deux, je ne sortirai pas de la soirée. Il faut faire tout ce que nous pouvons pour conjurer cet orage, et l’empêcher de se former. Cela vaudrait bien mieux que d’être exposé à ses éclats. — L. P.


Saint-Cloud, ce lundi matin, 9 mai 1831.

Le duc de Broglie est déjà invité à dîner pour aujourd’hui ; nous pourrons donc causer à notre aise, sans retarder sa réunion à sa famille.

Quant au Luxembourg, je partage décidément votre opinion qu’il est contraire aux intérêts de la France que le Roi des Belges, quel qu’il soit, fasse partie de la Confédération germanique. Nous devons donc nous y opposer ; mais l’arrangement à

  1. Le comte de Reinhardt, ministre de Saxe à Paris.
  2. Le marquis d’Eyragues, secrétaire de la légation de France, à Copenhague.