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M. LLOYD GEORGE
ET
LA DÉMOCRATIE PURITAINE

Un soir, pendant la session de 1884, un petit jeune homme, qui était venu à Londres pour passer un examen de droit, obtint la faveur d’assister à une séance du parlement. Ses yeux durent s’abaisser avidement sur ce décor historique où évoluaient des personnages dont le nom fameux était venu jusqu’à son village perdu dans les montagnes, jusqu’à cette échoppe de cordonnier où il avait grandi, jusqu’à cette obscure étude de province où il remuait des paperasses légales. Le speaker en perruque et en bas de soie, la table où reposait, avec la boîte aux dépêches et avec la Bible qui sert à assermenter les nouveaux membres, la masse d’armes qui a déjà survécu plus de deux siècles et demi à la méprisante ironie de Cromwell, le couloir par où les membres rentrent, un à un, les jours de vote, tous ces détails, connus d’avance, parlaient à l’imagination et à la mémoire du jeune spectateur.

Entrait-il beaucoup de respect dans sa curiosité ? J’en doute, et l’on comprendra bientôt pourquoi. Pourtant, on lui avait appris à vénérer le nom de Gladstone, et l’objet de ce culte, le grand vieillard, idole des Gallois, ses compatriotes, était là, devant lui, assis au banc de la Trésorerie, dans tout son prestige et semblait-il, — dans toute sa vigueur, bien qu’il approchât