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catholique. La droite s’en glorifie volontiers, mais à quel prix ? Entre les vieux conservateurs de la nuance de M. Woeste et les démocrates chrétiens, même très modérés, comme MM. Renkin et Carton de Wiart, l’entente sociale est difficile à établir, et le programme commun ne s’élabore qu’à grand’peine. Sans doute, on a fait beaucoup. On a voté la loi sur le contrat de travail, la loi sur l’insaisissabilité du salaire, la loi sur le travail des femmes et des enfans, la loi sur les accidens du travail, la loi sur les pensions ouvrières à tendances mutualistes, la création du Conseil supérieur de l’industrie et du travail, la loi sur le repos dominical, qui sont des actes législatifs importans. Mais avec le projet sur la limitation de la journée de travail dans les mines, on a touché le point de rupture. Entre les tendances étatistes de la jeune droite et les répugnances de la vieille droite, le gouvernement a connu dans les sessions 1906-1907 les plus graves difficultés. La fixation de la journée de travail à huit heures pour les adultes ayant été votée malgré le comte de Smet de Nayer, président du Conseil, celui-ci a démissionné en retirant le projet de loi. Depuis lors, ce projet réintroduit n’a été voté que par la Chambre et l’accueil qu’il a trouvé au Sénat révèle des divergences persistantes dont la conciliation n’est pas aisée.

Sur un autre terrain, la question des langues, phénomène pareil. Ici la division est d’une autre nature, mais elle n’est pas moins profonde. On connaît les prétentions des Flamingans à l’extension légale de leur langue. En 1907, M. Coremans dépose un projet de loi qui rend obligatoire l’enseignement du flamand dans les écoles privées de Flandre et subordonne la valeur légale des certificats délivrés par ces écoles à la preuve fournie par elles qu’un certain nombre de cours ont été faits en flamand. La droite a intérêt à satisfaire les Flamingans qui sont ses fidèles électeurs. Mais, d’autre part, elle se heurte à la crainte de ruiner les collèges épiscopaux en pays flamand et de mécontenter le clergé. Pourquoi ? Parce que la bourgeoisie catholique, qui place ses enfans dans ces collèges, veut pour eux une éducation française, celle-là même contre laquelle les Flamingans demandent qu’on légifère : voilà donc, une fois de plus, la droite coupée en deux. Les uns disent : « Les Flamingans ont raison. Si les parens ne remplissent pas leur devoir, qui est de donner à leurs enfans une éducation flamande, l’État doit les y