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Jésus étant dans l’agonie et dans les plus grandes peines, prions plus longtemps…


Et la prière de Pascal est si fervente, son émotion est si poignante, que la vision enfin prend corps et se rapproche. Du haut de sa croix, le divin Crucifié laisse tomber un regard de compassion et d’amour sur cette pauvre âme tremblante qui est là, courbée à ses pieds. Et voici que, dans l’horreur de la nuit, dans le silence de la pauvre cellule solitaire, une voix adorable se fait entendre :


Console-toi, tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais trouvé.

Je pensais à toi dans mon agonie, j’ai versé telles gouttes de sang pour toi…

Le Père aime tout ce que Je fais.

Veux-tu qu’il me coûte toujours du sang de mon humanité, sans que tu donnes des larmes…

Les médecins ne te guériront pas, car tu mourras à la fin. Mais c’est moi qui guéris et, rends le corps immortel.

Je te suis plus ami que tel et tel ; car j’ai fait pour toi plus qu’eux…


La voix est si douce, si tendrement persuasive qu’elle rrnd confiance et courage. Et voici qu’un dialogue sublime s’engage entre Pascal et son Dieu :


Si tu connaissais tes péchés, tu perdrais cœur.

— Je le perdrai donc, Seigneur, car je crois leur malice sur votre assurance.

— Non, car moi par qui tu l’apprends, t’en peux guérir, et ce que je te dis est un signe que je te veux guérir. A mesure que tu les expieras, tu les connaîtras, et il te sera dit : « Vois les péchés qui te sont remis. »

Fais donc pénitence pour tes péchés cachés et pour la malice occulte de ceux que tu connais.

— Seigneur, je vous donne tout !

— Je t’aime plus ardemment que tu n’as aimé tes souillures, ut immundus pro luto.

Qu’à moi en soit la gloire, et non à toi, ver et terre…


La vision a disparu ; la voix divine cesse de se faire entendre. Retombant sur elle-même, l’âme pécheresse, l’âme pénitente connaît désormais sa misère et l’unique, l’infaillible remède. Le Dieu qui « s’est uni » à Pascal « au fond de son âme » lui a révélé la voie à suivre pour son salut :


Je vois mon abîme d’orgueil, de curiosité, de concupiscence. Il n’y a nul