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parler d’une demi-douzaine d’autres, de MM. Walter Long, Bonar Law, lord Hugh Cecil, et de l’infatigable Winston Churchill, qui a encore parlé à Inverness. Ils contiennent aussi un pathétique appel de Chamberlain, le vieux lutteur paralysé qui doit singulièrement souffrir de ne pouvoir paraître sur les plates-formes et répondre, comme il y a quelques années il n’aurait pas manqué de le faire, à M. Lloyd George et à M. Winston Churchill, avec lesquels il ne serait pas demeuré en reste de sarcasmes, voire d’invectives. Il ne peut pas parler, mais il peut dicter, et cet appel qu’il adresse à ses concitoyens est émouvant : « Je m’adresse à vous comme Anglais, je m’adresse à vous comme patriotes. » Et son appel est en effet inspiré tout entier par le plus ardent patriotisme. On peut discuter tel ou tel point du passé politique de M. Chamberlain : on peut être ou n’être pas partisan du Tariff Reform ; mais il faut avouer que le vieil homme d’Etat a une idée singulièrement grande et fière de son pays. C’est aux Impérialistes surtout qu’il s’adresse. « L’Angleterre. dit-il, doit être un Empire ; si elle cessait de l’être, elle ne serait plus l’Angleterre que nous avons aimée. Si nous laissions se distendre les liens que nous avons noués avec ceux de nos enfans qui sont au-delà des mers, l’Angleterre verrait décliner peu à peu la haute situation qu’elle occupe depuis tant d’années. Elle tomberait au rang d’une nation de cinquième ordre qui ne vivrait que par la tolérance du monde. Nous pouvons empêcher cela. Nous pouvons l’empêcher par cette fédération que j’ai constamment devant les yeux comme un objet pratique d’aspiration (a practical object of aspiration), cette fédération des nations libres qui nous permettra de prolonger d’âges en âges les glorieuses traditions de la race anglaise. » Cet appel où les questions d’intérêt et de protection sont très habilement mêlées aux questions de grandeur et de fierté nationales, qui est répandu aujourd’hui même à des millions d’exemplaires non seulement par la puissante presse de Londres acquise presque tout entière à l’Unionisme, mais par la presse de province, produira-t-il tout l’effet qu’en attend assurément son ardeur, et qu’en espèrent les Unionistes ? On commencera de le savoir demain samedi, et surtout après-demain lundi, car personne, en ce pays, n’a l’idée qu’on pourrait voter le dimanche comme chez nous. Lundi soir, on connaîtra la composition du quart environ de la Chambre des Communes. Quels seront les résultats de ces premiers jours et des