assiste au grand conseil, à la fois consulte d’État et conseil de famille, où l’Empereur met en débat le choix de la nouvelle impératrice : sera-t-elle Russe, Autrichienne ou Saxonne ? En réalité, comme la Russie, à laquelle Napoléon s’est d’abord et très positivement adressé, le fait languir et laisse pressentir un refus, il tend à se détourner vers l’Autriche, qui met Marie-Louise à sa disposition ; c’est de ce côté que l’attire désormais une intime et orgueilleuse prédilection. La tenue du solennel conseil a moins pour but de former sa décision que de préparer l’opinion au revirement imminent. Mais Murat ne connaît pas les dessous de l’affaire et s’imagine que la question reste entière. Dans le conseil, il se prononce avec véhémence pour la grande-duchesse et surtout contre l’archiduchesse. Il conserve contre l’Autriche le préjugé révolutionnaire. Pour traiter la maison d’Autriche en ennemie personnelle, il a de plus cette raison qu’il la retrouve en face de lui et de ses ambitions, en Sicile, dans la personne de cette reine Marie-Caroline qui est issue du sang des Habsbourg et qui gouverne le roi Bourbon. Donc, il fulmine et s’emporte : par exception dans sa carrière, il exécute une charge à contretemps, et, pour foncer contre l’Autriche, choisit mal son moment. Après cette algarade, il repart pour Naples, laissant sa femme à Paris. L’Empereur s’étonne un peu de ce départ précipité et lui écrit : « Je suis fâché que vous partiez si vite ; dites à la Reine de venir dîner avec moi. »
Huit jours après, la nouvelle du mariage autrichien éclate ; l’Europe en retentit. Caroline comprend immédiatement la faute commise par son mari ; elle craint que Murat ne l’aggrave en persistant dans une attitude d’opposition et de bouderie. Au plus vite, elle lui écrit de ne point faire mauvaise mine à l’inévitable ; s’il ne revenait pas à Paris pour la célébration du mariage, l’effet serait désastreux. Les alarmes de la Reine sont d’autant plus vives que Murat s’enferme maintenant dans un silence chagrin et n’écrit plus :
« Je commence par te dire que je suis fort mécontente de toi ; pas une seule ligne de toi, cela ne t’est jamais arrivé.
« Nous avons été hier au bal chez la princesse Pauline et aujourd’hui à la chasse et il faisait un temps bien humide, et l’Empereur m’a dit : « Eh bien ! le Lazzarone vous oublie et il « ne pense plus à vous, il va être bien fâché, car j’épouse une « Autrichienne, » mais tout cela en riant. Je crois que, puisqu’il