Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/484

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

même de la campagne électorale pour le renouvellement de la Chambre. Il semble que, dans le pays, on se soit peu occupé, jusqu’ici de ce renouvellement ; mais on s’en préoccupe beaucoup à la Chambre, et la question du scrutin de liste avec représentation proportionnelle est toujours un cauchemar pour beaucoup d’esprits. Peut-être essaierait-on de se reprendre et de revenir sur les votes qui ont été émis il y a quelques semaines : mais il est bien tard maintenant pour modifier le régime électoral de la Chambre avant les élections.

Quant au Sénat, il continuera la discussion de la loi sur les retraites ouvrières qui semble peu avancée, puisqu’on n’en est qu’à l’article 3 et que cet article n’est même pas encore voté : or il y en a 37. Toutefois, le plus gros de la besogne est fait : on a établi les principes sur lesquels la loi repose ; on ira plus vite maintenant qu’il s’agit seulement des détails d’application. Ces détails cependant sont hérissés de difficultés, et il reste encore des questions très importantes à résoudre, celles par exemple qui se rapportent à l’administration des sommes énormes qu’il s’agira de placer et de faire fructifier, puisque le Sénat a préféré le régime de la capitalisation à celui de la répartition. Ces sommes s’élèveront à plus de 12 milliards. Le principe de la capitalisation a été attaqué, depuis qu’il est voté, par la Confédération générale du Travail, qui y voit l’amorce d’une escroquerie immense, et par des radicaux importans, comme M. Camille Pelletan. Laissons de côté la Confédération générale du Travail. Les argumens de M. Pelletan sont plus sérieux, mais ils viennent un peu tard, aujourd’hui que le vote du Sénat est acquis, et nous attendrons pour en parler qu’il les reproduise devant la Chambre. Le fera-t-il ? En aura-t-il le temps ? La loi sur les retraites ouvrières ne reviendra au Palais-Bourbon qu’à la veille des élections : tout porte à croire que, pour en finir, la Chambre la votera les yeux fermés, sans y introduire aucun amendement, comme elle l’a fait pour d’autres fois non moins graves, et, par exemple, pour la loi militaire.

Où en est la discussion de la loi au Sénat ? Nous avons dit que la Haute Assemblée avait voté les principes fondamentaux de la loi. Elle l’a fait dans un sens, à notre avis, très regrettable, mais qu’on doit considérer comme définitif. A partir du jour où le principe de l’obligation a été consacré, la loi a été engagée dans une voie dangereuse à un double titre, d’abord parce que les finances publiques sont engagées elles aussi dans des proportions qu’il est difficile d’indiquer avec certitude, — tout le monde convient que les chiffres énoncés ne représentent que des hypothèses et des approximations ; — ensuite, parce