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Une remarque assez intéressante que l’on peut faire aussi, c’est que toutes ces pointes sont tordues vers l’Est. Ainsi la Patagonie pour l’Amérique du Sud, le Mexique pour l’Amérique du Nord, l’Indo-Chine pour l’Asie, et son prolongement insulaire, sont tordus vers l’Est. Cela tient au retard dû à la rotation pour les parties solides, qui sont à l’extrémité d’un plus grand rayon que les parties effondrées.

Toujours dans la même hypothèse tétraédrique, puisque les pointes des trois triangles principaux sont au Sud, l’un des sommets du tétraèdre solide doit percer la surface de la mer au Pôle Sud et y former un continent assez élevé. C’est justement ce que l’expérience a vérifié. Et, de l’autre côté, on doit trouver une dépression à peu près égale, située au Pôle Nord. Le Pôle Sud étant à près de 3 500 mètres au-dessus du niveau des mers, ainsi que l’a constaté l’expédition Shackleton, on doit trouver, au Pôle Nord, une mer profonde de 3 500 mètres également. C’est précisément ce que vient de vérifier une observation de Peary, dont nous ne connaissons pas encore les sondages au Pôle même, mais qui, aux environs du 88e degré, a trouvé une profondeur d’eau de 850 brasses, et, plus au Nord, davantage.

Sans entrer dans de plus amples détails, nous voyons déjà que la vérification expérimentale de cette théorie tétraédrique était l’un des points intéressans que la découverte du Pôle Nord permettait d’établir.


La déformation tétraédrique ne s’applique pas au globe terrestre dans toute sa rigueur. La contraction n’a pas été suffisante pour que la partie solide de notre planète ait pris la forme géométrique d’un tétraèdre parfait qui, à surface égale avec une sphère, a un volume beaucoup moindre. Elle a simplement tendu à la prendre. Le tétraèdre parfait s’écarte beaucoup de la sphère, et d’autre part, nous voyons que les plus fortes saillies et les plus grandes dépressions de l’écorce terrestre sont très faibles, proportionnellement au rayon de la sphère primitive. Mais, pour rattacher la forme actuelle de la partie solide du sphéroïde terrestre à la théorie tétraédrique, il suffit de considérer, au lieu du tétraèdre simple, une forme secondaire qui en dérive et qui existe dans la nature, car elle est assez fréquente en cristallographie. C’est celle que l’on appelle l’hexatétraèdre,