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rapport avec le gouvernement de Versailles. Heureusement, j’étais sûr de mes garçons de bureau, qui me sont dévoués, et j’avais engagé notre homme de peine, dont je me défiais, à quitter Paris ; il était parti pour son pays. J’ai donc pu échapper à la Commune et garder mon autonomie, quoique nous vissions sans cesse passer, devant notre porte, des bandes de fédérés, de « turcos de la Commune, » de « vengeurs de Flourens » et des membres de la Commune qui se rendaient au Mont-de-Piété, établissement sur lequel ils faisaient un décret. J’ai tenu les Archives ouvertes au public jusqu’au 21 mai et j’ai eu quelques visiteurs, anciens habitués, même deux hommes qui faisaient des recherches pour le service du « citoyen » Protot, délégué à la Justice, lequel, ayant habité rue de Braque, nous connaissait fort bien. Je sortais peu. Je prenais l’air, tous les jours, après mon dîner, et parcourais les quais et le faubourg Saint-Germain, presque entièrement désert. J’ai, alors, couché dix jours chez Mme D***, par mesure de prudence, car on faisait force arrestations.

Il m’a fallu, durant huit jours, nourrir et payer les gardes nationaux, que j’avais persuadés de rester ici pour nous défendre, et qui ont concouru avec nous à repousser les fédérés, quoiqu’ils fussent la plupart d’anciens communeux du quartier. Tout cela m’a rendu assez populaire, pour qu’un certain nombre d’entre eux m’aient offert une candidature à l’Assemblée nationale.


Alfred Maury.