Mais la Belgique ! voilà ce qui m’absorbe d’une manière bien pénible. La dépêche est partie de Lille à trois heures. Elle sera à Bruxelles dans la soirée. Qu’en sortira-t-il ? Avant tout, point de guerre. Mais que va devenir cette Belgique ? J’en perds l’esprit et j’ai toujours besoin de me consoler et de chercher en causant, avec vous, des lumières pour m’éclairer dans cette atmosphère de ténèbres. Je n’y vois goutte et je n’en puis plus.
J’ai ce soir un bal d’enfans. Venez-y un moment pour que nous causions. Je compte dans ma tête les issues par où peut aboutir l’affaire et j’en trouve quatre dont aucune ne me plaît. Il y a de quoi en devenir fou.
À ce soir.
Lundi 7 février 1831, à 10 heures du matin.
On dit, mon cher général, que la nuit porte conseil, et Dieu sait que les réflexions ne m’ont pas plus manqué que la matière d’en faire de bien sérieuses et de bien tristes ! Tâchons qu’elles s’améliorent. Il n’y en a qu’un moyen seul et unique, c’est de parvenir à faire pour la Belgique un arrangement qui convienne à la fois aux Puissances, aux Belges et à nous-mêmes. Je ne me dissimule pas que la difficulté en soit énorme ; car jusqu’à présent, il n’y a eu, des trois côtés, d’autre action que pour faire rejeter les diverses mesures que voulait chaque parti.
Il faut donc changer, au moins en ce qui dépend de nous, cette tactique et tâcher de faire adopter une mesure qui ne nous blesse pas, par les deux autres parties.
C’est un fait que, du côté des Belges, nous n’avons eu jusqu’à présent d’autre alternative que Nemours et Leuchtenberg. Nemours l’a emporté et nul ne doute que cette victoire n’ait été bien contestée et bien difficile à obtenir pour ceux qui le voulaient ; mais enfin il l’a emporté. Néanmoins, comme cette victoire ne doit pas lui rester et que les puissances y mettent un veto dont nous ne voulons pas courir la chance, il faut donc chercher une autre combinaison qui réunisse les trois vœux ; et avant tout éviter tout ce qui amènerait une rupture, soit d’un côté, soit de l’autre, car alors tout devient impossible.
Eh bien ! je dis que si vous n’obtenez pas des Belges, à Paris, ce que vous n’avez pas pu obtenir à Bruxelles, vous l’obtiendrez encore moins si vous les y laissez retourner sans l’avoir obtenu. Ne perdez pas cela de vue ; c’est là le nucleus de l’affaire et c’est