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mécontentement était universel. Tandis que la Hollande attribuait à l’annexion la ruine de son commerce, la Belgique rendait cette même annexion responsable de ses maux et regrettait son ancien gouvernement.

Telle est la situation qu’avaient trouvée, à Bruxelles, les proscrits français. Elle était propice aux plans des agitateurs ; elle favorisait les menées des plus violens dont les écrits englobaient dans les mêmes critiques et les mêmes attaques les gouvernemens alliés, le gouvernement français et celui des Pays-Bas. Un mémoire du duc de Wellington, communiqué en 1817, à la Conférence des ambassadeurs à Paris, signale le danger qui résulte de cet état de choses et la nécessité d’y mettre un terme :

« L’objet qui, dans le moment actuel, donne le plus de mécontentement aux amis du bon ordre et aux gouvernemens, ce sont les libelles publiés dans les Pays-Bas. Il est vrai que la difficulté de faire circuler ces libelles en France, par suite des mesures de police qui ont été adoptées, donne à espérer qu’ils ne fassent pas tout le mal qu’on se propose de faire ; mais ils sont, sans contredit, une insulte pour le roi de France, sa famille, son gouvernement et ses adhérens, et même pour l’autorité de l’Europe alliée, on tant qu’ils sont écrits et publiés par les restes d’un parti, qui, ayant réussi à renverser presque tous les gouvernemens du monde, a lui-même été vaincu deux fois par la force des armes, et que ces individus qui composent ces restes doivent leur vie à la clémence des mêmes souverains qu’ils insultent.

« Ils ont choisi pour leur résidence, et pour l’endroit d’où ils lancent leurs libelles, les États d’un de ces souverains alliés, et tandis qu’ils réclament la protection de ses dispositions libérales et des lois de son pays, ils font tout ce qu’ils peuvent pour ébranler la loyauté de ses nouveaux sujets ; ils insultent ses serviteurs et ses ministres, partout où ils peuvent ; sa personne même, tout comme les mesures de son gouvernement, n’est point à l’abri de leurs injurieux libelles, et il est bien connu que, s’ils devaient réussir dans leurs plans contre la France, la première chose qu’ils feraient serait, comme c’était jusqu’ici toujours le cas, de renverser le gouvernement, et de conquérir le Royaume des Pays-Bas. Comme cependant les mesures à prendre pour combattre ce système de libelles peuvent affecter la police intérieure d’un des Etats formant la grande alliance