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murs de l’abside surtout, au lieu d’être percés de fenêtres, au lieu d’être ornés de pilastres ou de colonnes saillantes, ne sont plus que des surfaces lisses destinées à recevoir de grandes compositions religieuses qui s’imposeront aux regards des fidèles.

C’est pour décorer ces églises que les peintres de Bologne sont appelés à Rome, c’est là qu’ils trouvent un immense champ de travail, semblable à celui que les basiliques du moyen âge avaient offert aux maîtres de l’école de Giotto ; et, comme au temps de Giotto, leurs peintures vont être des œuvres d’enseignement, faites pour instruire les fidèles. L’église redevient la Bible du peuple.

Les églises types de cette époque sont le Gesu (1558), la Chiesa nuova (1575), Saint-Louis des Français (1589), S. Andréa della Valle (1591), S. Carlo al Corso (1612), S. Carlo a Catinari, Saint-Ignace (1626). Malheureusement un certain nombre d’entre elles, notamment le Gesu et la Chiesa nuova, ont été très profondément modifiées au cours du XVIIe siècle et ont pris, par suite des décors du Bernin, de Pierre de Cortone, du Baccicio ou du Père Pozzo, un caractère tout différent de celui qu’elles avaient à l’origine. Pour se rendre compte de ce qu’était une église de la fin du XVIe siècle, décorée par des maîtres bolonais, il faut voir l’abside de Saint-Ignace et surtout celle de S. Andréa della Valle, peinte par le Dominiquin.


IV. — INFLUENCE DE L’ÉCOLE BOLONAISE

L’activité est si grande en Italie au début du XVIIe siècle, les idées agitées sont si nombreuses et si fécondes que l’art italien, grâce aux maîtres de Bologne, agit sur l’Europe tout entière ; jamais peut-être il n’eut un empire plus absolu : toute l’Europe du XVIIe siècle est italienne, comme elle sera toute française au XVIIIe siècle. C’est de l’Italie que sortent Poussin et Claude Lorrain en France, Rubens et van Dyck dans les Flandres, Ribeira, Velazquez et Murillo en Espagne, et, dans une grande mesure, Rembrandt dans les Pays-Bas.

Poussin est venu directement de France à Borne, et n’a pas connu en Italie d’autre école que celle de Borne. Il a les qualités essentielles des Bolonais ; il est profondément spiritualiste et religieux, comme ce Dominiquin qu’il admirait tant et qu’il estimait être le plus grand des peintres après Raphaël ; comme