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Bolonais, de Grégoire XIII et de Grégoire XV, dit mieux que tous les raisonnemens l’importance que Bologne prit à ce moment dans les destinées de l’Italie.

Il convient d’insister et de se rendre, compte des extraordinaires conséquences qu’eut l’annexion de Bologne aux Etats de l’Eglise. Les malheurs du moyen âge, l’exil d’Avignon, le grand Schisme, avaient fait de Rome une ville désemparée, dépourvue de tout organisme social ; autour de Rome, dans le territoire pontifical, seule, l’Ombrie, pauvre, sans grandes villes, avait donné des écoles d’art ; mais elle n’était qu’un satellite de Sienne et de Florence.

Par suite de l’annexion de Bologne, c’était un avenir tout nouveau qui s’ouvrait pour elle ; Bologne était un des grands centres de l’Italie, c’était peut-être le plus grand centre intellectuel ; tout autant que Padoue, elle était célèbre par son Université, et un dicton populaire avait marqué ce caractère en disant : Bologna docet. Elle donne des papes à Rome avant de lui donner des artistes, et chez ces papes, comme, chez ces artistes, nous trouverons un même caractère : ce sont des lettrés, des universitaires. Avec Grégoire XIII, ce n’est plus un grand seigneur, un Borgia, un della Rovere, un Médicis ou un Farnèse, qui monte sur le trône de Saint Pierre, c’est un savant. C’est l’Université, c’est la science italienne qui, par lui, donne au monde le Calendrier grégorien et qui, mettant au premier rang des préoccupa-lions pontificales le désir d’instruire le peuple, lui fait construire plus de vingt grands collèges.

De Grégoire XIII il faut rapprocher cet autre Bolonais, le pape Grégoire XV, qui ne régna que peu de temps, mais dont le principal souci fut encore le problème de l’instruction et qui fonda le plus vaste établissement d’instruction qu’il y ait au monde, non pas un collège pour une ville, non pas une université pour une province, mais une université pour le monde entier : la Propagande.

Ce qu’ils ont commencé à faire par l’école, les papes le continueront par l’œuvre de leurs artistes. L’art de Bramante et de Michel-Ange ne saurait plus les satisfaire et les maîtres de Bologne vont réaliser la forme nouvelle correspondant à l’idéal de leur pensée, les Bolonais pour se conformer à leurs désirs se préoccupèrent avant tout de concevoir leurs sujets chrétiens le plus chrétiennement possible et ils retrouvèrent ainsi la loi la plus essentielle- de l’art, celle qui consiste à faire concourir toutes les