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(Orosi, Spacci, Cumeni, Dicri, Paridi) dont les trois premières forment la Mirditie proprement dite ; en temps de guerre cinq bannières d’Alessio se joignent aux Mirdites. Deux mille montagnards des environs de Diokova reconnaissent aussi l’autorité du chef des Mirdites.

Si peu nombreux que soient ses habitans, la Mirditie tient une place importante dans la politique balkanique ; elle le doit surtout à sa religion. Petit noyau perdu entre la masse orthodoxe du Nord et la masse musulmane de l’Est, les Mirdites sont, dans toute la péninsule, les seuls catholiques indigènes ; il était naturel qu’ils attirassent l’attention du Saint-Siège et des puissances catholiques, l’Italie, l’Autriche et la France. Les Mirdites ont un chef héréditaire qui, avec le titre de prince, exerce sur les différens dans[1] une autorité patriarcale et étend son influence sur une grande partie de l’Albanie du Nord. Les Turcs, ayant conquis, à grand’peine, les villes et les vallées de l’Albanie, n’eurent garde d’user leurs forces à soumettre un pays où il n’y avait rien à gagner que des coups ; ils laissèrent aux Mirdites leurs princes, de la famille des Doda, qui descend du fameux Lek Dukadgin, le Lycurgue de cette constitution primitive. Le premier de cette dynastie qui exerça son pouvoir sur les Mirdites fut, au XVIIe siècle, Marko Gion. Son descendant, Bib-Doda, joua un certain rôle dans les affaires balkaniques au temps de la guerre de Grimée ; il mit sur pied 2 000 hommes qui tinrent en respect les Monténégrins ; à la demande du maréchal Pélissier, Bid-Doda fut fait pacha et général de brigade. A partir de cette époque, les Doda invoquèrent souvent la protection de la France qui ne leur fit jamais défaut. Un consul de France, M. Aubaret, fut le conseiller de Bib-Doda qui, lorsqu’il mourut en 1868, l’institua son exécuteur testamentaire et plaça ses enfans sous la protection de la France. Prink-Doda, son fils, aujourd’hui prince des Mirdites, n’avait alors que neuf ans ; avec l’appui du consul de France, son cousin Dhone fut désigné pour

  1. La Mirditie a une organisation oligarchique par clans. Les anciens des villages forment un petit corps élu qui règle les litiges d’après la « loi des montagnes ; » les chefs de bannières forment un conseil supérieur présidé par le chef suprême des Mirdites.