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à se faire remarquer aussi peu que possible. Il n’ira point à la Chambre des pairs. Son projet est de rester peu de temps ici, d’y chercher une maison de campagne, vu que le Raincy est inhabitable, de retourner en Angleterre, de ramener sa femme faire ses couches qui doivent avoir lieu vers la fin de mai, puis d’aller faire un voyage à Naples pour tâcher de se faire payer la dot qui ne l’est pas encore. Tout cela est fort bien et n’en est pas moins sujet à observation[1]. »

Il semble d’après cette lettre que Louis XVIII se soit moins défié du Duc d’Orléans lui-même que de la faction qui s’obstinait à le mettre en avant pour affaiblir et combattre le gouvernement royal. En tout cas, elle démontre que le Roi ne prenait pas au tragique les informations de l’agence politique de Londres et que, tout en les utilisant dans la mesure où ils devaient l’être, il savait quel cas il fallait faire des dires des gens de police. Il le savait d’autant mieux que l’émigration le lui avait enseigné au prix des plus douloureuses déceptions et des plus cruelles épreuves.


ERNEST DAUDET.

  1. A propos de l’entrevue du Duc d’Orléans avec Louis XVIII, le comte de Goltz écrivait, le 26 avril, au chancelier prussien, prince d’Hardenberg. « Le général Pozzo a eu, hier matin, un entretien avec le Duc d’Orléans, dans lequel celui-ci, après avoir exprimé sa satisfaction de la manière dont le Roi et la famille l’avaient de nouveau reçu, et du système auquel le Gouvernement s’est attaché, pour contenir les exagérés de tous les partis, lui a dit qu’il avait été bien aise de voir que l’effet de son dernier séjour à Paris avait été nul, qu’il soutiendrait toujours le Roi par ses propos et sa conduite dans la marche sage qu’il a adoptée, et qu’il ne se mettrait point en évidence ; mais que si S. A. R. Monsieur se compromettait, les regards de tous les individus inquiets et mécontens tomberaient toujours sur lui, sans qu’il puisse l’empêcher.