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serait libre et point enfermé dans une citadelle. On a ordonné à M. de Wissemberg d’accélérer son départ et de le décider le plus tôt possible.

« Tout cela est le mieux du monde ; mais je suis persuadé que Las Cases qui a établi ses relations à Francfort, qui y trouve sûreté, appui et facilités de tout genre, se gardera bien d’en partir et encore, peut-être, prendra-t-il le parti de passer dans les Etats voisins et peut-être de s’échapper et de disparaître. Sa femme est venue le trouver. Il l’a renvoyée en France et il attend son retour. Cette promenade n’est sûrement pas sans but ; mais j’imagine bien qu’elle ne vous aura pas échappé et que l’on a pris toutes les précautions nécessaires pour être instruit de ses actions et même de ses projets. Mais enfin, elle va revenir et les passeports seront là ; mais sous un prétexte ou sous un autre, il ne partira pas, et alors que fera-t-on ?

« Ici, on me dit : nous pouvons le recevoir, le surveiller et le garder ; mais nous n’avons aucun moyen pour l’enlever au territoire de Francfort si on l’y laisse et n’étant sur aucune des listes de bannissement ou d’exil, nous n’avons aucun droit de nous emparer de sa personne. On a refusé de le recevoir aux Pays-Bas et on l’a conduit en Prusse ; on a refusé de le recevoir en Prusse et on l’a conduit à Francfort, parce qu’il a demandé d’aller en Autriche. Il reste à Francfort ; il faut donc que le Sénat refuse de l’y laisser ; il faut donc l’obliger à le lui refuser. Ici, l’on pense que, pour parvenir à ce but, il faut que le gouvernement français demande au Sénat l’éloignement de l’homme dangereux qui semble vouloir y fixer son domicile, et cette demande peut être appuyée par les ministres des cours alliées. »

Il résulte des lettres qu’on vient de lire que l’institution policière, organisée par le gouvernement français pour un but d’informations et de défense, n’était pas moins bien servie par les diplomates que par ses agens secrets. On est même enclin à se demander si le service des premiers ne lui aurait pas suffi, au moins pour l’étranger, et pourquoi elle avait mis en mouvement cette légion d’observateurs qui ne pouvaient être recrutés que dans les bas-fonds sociaux et dont les dires étaient si souvent inexacts.

Dans ce personnel créé en vue d’un espionnage permanent nu dedans et au dehors, tout n’est pas de même valeur ni de même moralité. Il convient de le diviser en catégories et de ne