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C’est un bon exemple, et c’est aussi la vraie méthode. D’autres ont parlé de réalisations ; M. Charles Benoist a pris la grande route qui y conduit.


Nous avons déjà, à plusieurs reprises, fait allusion à une lettre que les cardinaux, évêques et archevêques de France ont adressée aux pères de famille au moment de la rentrée des classes, pour leur indiquer leurs droits et leurs devoirs au sujet de l’école où ils envoient leurs enfans. Il était facile de prévoir que la manifestation de l’épiscopat produirait une grande effervescence dans les milieux non catholiques, et qu’elle serait exploitée à la veille des élections prochaines dans un intérêt tout politique, ou plutôt tout électoral. Sans même attendre la lettre épiscopale, nous avions annoncé comme un fait à peu près certain que les radicaux chercheraient à masquer l’inanité et le vide de leurs programmes en cherchant à réveiller les passions antireligieuses et les luttes anticléricales. C’est ce qui n’a pas manqué d’arriver. Si les évêques s’étaient seulement inspirés des motifs d’opportunité, ils auraient ajourné leur avertissement aux pères de famille : ils ont cru préférable de le faire entendre au début de l’année scolaire, et peut-être ont-ils eu raison. A quelque moment qu’ils eussent parlé, ils auraient soulevé des tempêtes.

Les outres de l’Eole radical sont, en effet, tellement gonflées qu’il suffit d’une piqûre d’épingle pour en faire sortir la rafale. Elle fait rage en ce moment. On croirait, à lire les journaux radicaux et socialistes, et même à entendre M. le président du Conseil, que les évêques ont attaqué la République elle-même, et cela étonne toujours un peu, quelque vieille habitude qu’on ait de voir confondre la République avec toutes sortes de choses qui n’ont rien à faire avec elle. La nécessité de l’école laïque et neutre ne provient nullement de la République ; elle serait tout aussi grande sous une autre forme de gouvernement ; elle est la même dans les pays monarchiques que chez nous, et elle y trouve la même satisfaction. Les évêques, s’ils ont attaqué l’école laïque, n’ont donc pas attaqué en elle la République. Mais ont-ils même attaqué l’école laïque ? Lisons leur lettre. « Pères et mères, disent-ils, vous avez d’abord le droit et le devoir de choisir pour vos enfans une école où ils puissent être élevés comme vos croyances le réclament. » Les évêques ont raison de parler ainsi ; mais la liberté qu’ils réclament pour les pères de famille catholiques, d’après le même principe, appartient aussi aux autres : ceux-ci ont un droit égal à pouvoir élever, ou faire élever leurs enfans conformément à leurs propres