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des élémens importans d’appréciation de la valeur d’un aéronef. Toutefois, il y a une distinction à faire ; on peut envisager deux sortes de vitesses qui, dans le langage technique, ont reçu les noms de vitesse absolue, et de vitesse propre.

La vitesse absolue ou effective est celle que nous sommes tous habitués à considérer ; c’est la vitesse mesurée par rapport au sol au-dessus duquel se déplace le navire aérien. Si un dirigeable, parti de Paris à 8 heures du matin, se trouve à 41 heures au-dessus d’Auxerre, la distance qui sépare ces deux villes étant, à vol d’oiseau, de 150 kilomètres, on dira que sa vitesse absolue aura été, en moyenne, de 50 kilomètres à l’heure. Cette vitesse absolue est celle qui nous intéresse au point de vue pratique. C’est le fait brutal, abstraction faite des circonstances.

Mais, au point de vue du mérite de l’appareil, ce sont précisément ces circonstances qui sont à considérer. La vitesse effective résulte de la combinaison de deux autres vitesses : la vitesse propre du véhicule, qui sera définie tout à l’heure, et la vitesse du vent. Pour employer l’expression consacrée, la vitesse absolue est la résultante de la vitesse propre et de la vitesse du vent.

Tout le monde sait ce qu’est la vitesse du vent. Quant à la vitesse propre d’un navire aérien, sa définition est très simple ; c’est la vitesse qu’il pourrait obtenir, s’il n’y avait pas de vent ; ou encore, c’est sa vitesse en air calme, ou enfin sa vitesse par rapport à l’air ambiant supposé immobile.

De ces deux élémens, dont la combinaison détermine la vitesse absolue, l’un, la vitesse propre, dépend de la constitution du navire aérien, et les efforts de tous les ingénieurs aéronautes tendent à lui donner une valeur aussi grande que possible ; l’autre élément, la vitesse du vent, nous échappe complètement, et nous devons la subir telle qu’elle est. Or, suivant la direction et la vitesse du vent, il faut avoir des vitesses propres très différentes pour obtenir une vitesse effective déterminée.

Si, par exemple, le jour où notre dirigeable s’est rendu de Paris à Auxerre en trois heures, le vent soufflait précisément dans la direction voulue, avec une vitesse de 50 kilomètres à l’heure, le vent à lui seul aurait suffi à faire effectuer le voyage dans le temps donné, sans que la vitesse propre ait eu à intervenir ; l’aéronaute aurait pu laisser stopper son moteur indéfiniment, et il aurait atteint à peu de frais le résultat cherché. La vitesse effective serait la vitesse même du vent ; la vitesse propre