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Jésuites trouvèrent le moyen d’y dominer ? « La main des Jésuites » est, on le sait, l’une des explications qui viennent le plus souvent à l’esprit des historiens politiques ou religieux de la France. Quelque commode qu’elle soit, cette hypothèse ne serait pas, ici, suffisante.

Sans doute la formation de la Compagnie, son organisation savante et pratique, son rapide progrès, ses réussites merveilleuses ne purent pas ne pas frapper les Jésuites, d’autant plus qu’il y avait beau temps qu’eux-mêmes ils avaient réalisé, en partie, une semblable association des bonnes volontés laïques au service de l’Église. Elles n’étaient pas, en effet, si différentes de la Compagnie du Saint-Sacrement, ces « congrégations » de la Sainte Vierge, composées les unes de « messieurs, » les autres d’artisans et de domestiques ou de militaires, qu’imagina le premier compagnon de saint Ignace, le P. Lefebvre, et que les Jésuites annexèrent, dès les premières années de la Compagnie, à leurs collèges. Elles aussi, elles étaient autre chose que de simples réunions de prière : elles secouraient les pauvres, les malades, les prisonniers, se chargeaient de l’instruction des enfans, dotaient les jeunes filles. Colle que dirigeait à Paris, vers 1640-1650, le P. Bagot, du collège de Clermont, et qui avait son siège au faubourg Saint-Marcel, visitait les hôpitaux, les prisons, les églises[1]. Et dans ces années du milieu du XVIIe siècle, où les jésuites Chaurand, Le Valois, Huby travaillèrent admirablement sur divers points de la France, à la régénération spirituelle et à l’amélioration morale et matérielle du sort du peuple, les Congrégations de Notre-Dame secondèrent leurs efforts.

Même l’immixtion dans la vie publique de ces petites sociétés, créées et dirigées par les Jésuites, ne fut pas sans effrayer, vers cette époque, en province, les autorités locales : en 1631, en Normandie, le Parlement essayait de l’enrayer. Outre cette activité parfois indiscrète, un autre trait de ressemblance qu’avaient les congrégations jésuitiques avec la Compagnie du Saint-Sacrement était leur force de multiplication. Nées au fond des collèges, dit Crétineau-Joly, « elles se propagèrent dans le monde avec la célérité que l’ordre des Jésuites imprimait à toutes ses

  1. « On assure, — dit une note de police de 1663 sur les « communautés, » — que cette nouvelle congrégation a quelque rapport avec celle de l’Ermitage de Caen dont on a tant parlé. « Cité par Ch. Gérin, Rech. Hist. sur l’assemblée de 1682, 2e édition, p. 523.