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y avait déjà trois ans alors que la Compagnie du Saint-Sacrement de Paris avait disparu. Donc, dans la campagne qui aboutit, en 1666, à sa disparition, l’effort des « libertins de lettres » contribua, sans nul doute, aidé par l’impatience dépitée des bourgeois ou des courtisans ; ce n’est pas toutefois cet effort qui eut à ce résultat la plus grande part. Autrement redoutables furent à la Compagnie les coups de ses adversaires d’Eglise.


III. — LA COMPAGNIE DU SAINT-SACREMENT ET LE JANSÉNISME

Du côté ecclésiastique, de multiples inimitiés se manifestèrent contre elle à cette date, selon les renseignemens que donne, tristement, sur cette « Passion » de la Compagnie, la relation de Voyer d’Argenson. L’inimitié des « supérieurs » officiels est trop facile à comprendre : je la rappelle ici sans y insister. Renseignés enfin par les divers scandales de 1658-1660, sur la nature d’une concurrence secrète et universelle dont ils pouvaient ressentir depuis 1630 les sourdes atteintes, et auprès de laquelle la concurrence des congrégations régulières, des moines tant détestés par eux, n’était que bien innocente, ceux des évêques et des curés qui n’avaient point fait partie de la Compagnie, — et même peut-être quelques-uns de ceux qui, en ayant fait partie, la connaissaient trop bien pour s’en accommoder, pour peu qu’ils tinssent à honneur d’être les maîtres en leurs diocèses, — ne purent que travailler, plus ou moins ouvertement, à se débarrasser de cette collaboratrice importune. Je rappellerai ici, seulement pour mémoire, que, de l’aveu de Voyer d’Argenson, « la dernière persécution qui, » en 1665, « donna le coup de la mort à la Compagnie, fut excitée par un curé de Paris qui crut s’acquérir un grand mérite auprès du premier ministre, de l’avertir de quelque assemblée secrète qui se faisait sur sa paroisse. » Le rôle joué par le Jansénisme dans la destruction de la Compagnie du Saint-Sacrement fut probablement plus important encore que l’hostilité du clergé constitué, à une date où Port-Royal, soutenu par la faveur publique, allait imposer au pouvoir royal, et au Pape lui-même, la « paix de l’Église. »

Ce rôle, l’affaire de l’Ermitage suffirait à nous le révéler. La « Relation, » si documente, par laquelle le pouvoir et le public furent saisis de l’existence et des menées du Saint-Sacrement,