Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 53.djvu/897

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Au moment où il lui faut faire un effort énergique pour organiser le pays et compléter son outillage économique, c’est un précieux avantage. L’Australie, placée dans des conditions analogues, a vu, — et voit encore, — son gouvernement presque réduit à l’impuissance et ses progrès retardés par les exigences d’un groupe politique, organe d’une seule classe. L’Union sud-africaine est, jusqu’à présent, à l’abri de ce danger.

Enfin, le partage presque égal entre les forces politiques des anciens partis anglais et boër, paraît aussi une circonstance favorable, parce qu’aucun des deux ne peut espérer avoir raison de l’autre. La pression des intérêts particuliers et locaux viendra souvent contrarier cette division pour en former de nouvelles, justifiées par des raisons d’ordre économique. Ainsi la nécessité de concessions réciproques, déjà si hautement reconnue à la Convention nationale, s’imposant encore davantage, devra conduire à d’autres classemens n’ayant pas pour base unique la communauté d’origine.

La collaboration à des œuvres utiles, le lent travail de combinaison des intérêts privés, la fréquence des rapports encouragée par des communications plus faciles, les mariages mixtes, rapprocheront progressivement les enfans des deux races. Avec le temps, le sentiment national se fortifiera, et les liens entre eux se resserreront en se multipliant. L’union politique pouvait seule être le point de départ de cette évolution. Elle fut ce « premier pas » qui, dit le proverbe, coûte plus que les autres. Mais la voici achevée. La tutelle, puissante et légère à la fois, de l’Angleterre, protège la nation sud-africaine contre les improbables menaces du dehors. Il lui suffira, pour grandir en richesse et puissance dans son vaste territoire, de se protéger contre ses propres erreurs.


BIARD D’AUNET.