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Ce fut le gouvernement de la colonie du Cap qui en prit l’initiative. Il est intéressant de remarquer qu’à ce moment les Progressistes détenaient le pouvoir dans cette colonie. Le premier ministre était le docteur Jameson, le même qui, dix années auparavant, ’conduisait au Transvaal l’insurrection contre le gouvernement du président Krüger. M. Jameson n’avait pas passé « de l’autre côté de la barricade ; » il servait encore la même cause, la cause sud-africaine, mais par des procédés différens, parce que les circonstances avaient changé, et aussi parce que, dans l’intervalle, il était devenu un homme de gouvernement. Ne voyant pas d’autre moyen, pour mettre un terme aux inextricables complications des relations intercoloniales, que de préparer une Fédération, il s’adressa, d’accord avec ses collègues, à lord Selborne, le priant, au nom du gouvernement du Cap, d’examiner dans son ensemble la situation du problème sud-africain. Par cette démarche (29 novembre 1906) à laquelle les trois autres colonies s’associèrent aussitôt, l’attention du Haut-Commissaire était appelée sur les inconvéniens de l’intervention du gouvernement anglais dans les affaires de chaque colonie, et sur la suggestion d’instituer un gouvernement central ayant autorité pour décider des questions d’intérêt commun.

En réponse à cette communication, lord Selborne rédigea un mémorandum, qu’il fit parvenir aux gouvernemens intéressés, et à Londres, le 7 janvier 1907. Ce document, intitulé : Revue des relations actuelles entre les colonies sud-africaines, exposait la nature et les causes des obstacles qui entravaient le développement de ces possessions. Il faisait ressortir l’impossibilité d’arriver à des accords judicieux et durables dans les circonstances du moment. L’extension des voies ferrées, par exemple, réclame des arrangemens que des conseils consultatifs peuvent préparer, mais sont impuissans à réaliser, maintenir ou modifier. D’où résulte que les tarifs de chemins de fer sont établis, non dans l’intérêt du commerce, mais dans l’intérêt fiscal de chaque colonie, et selon les convenances variables des industries locales. L’union douanière donne lieu à des plaintes incessantes, parce que le tarif douanier, résultat de concessions mal équilibrées, et dont les tarifs de chemins de fer contrarient souvent l’effet utile, n’est pas l’expression d’une politique économique inspirée de l’intérêt général. Ce tarif douanier ne peut être amendé par les assemblées qui l’ont ratifié, et pourtant chacune d’elles a la