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tout ce que j’avais aimé, connu, fréquenté, était devenu fou ? Et moi, je finirai par là. Il n’y a rien que je ne fisse ou que je ne donnasse pour voir Mouche heureuse. J’espère encore que sa tête se remettra. Il peut se faire que ce ne soit qu’un dérangement passager. Pour tout le bonheur qu’elle m’a donné, je ne puis rien pour elle. Chère sœur, c’est une déplorable impuissance que celle des amitiés humaines.

« Vous m’avez mal compris. Je ne vous demandais point de conseils. Je raisonnais sur ma position, tout simplement, la jugeant très bien et l’acceptant. Aucune parole de ces gens-là ne peut suffire : il faut des faits : allons donc comme nous sommes ! Molé a réussi, et tous les gens de sa sorte réussissent : il est médiocre, bas avec la puissance, arrogant avec la faiblesse, il est riche, il a une antichambre chez sa belle-mère, où il insulte les solliciteurs, et une antichambre chez les ministres, où il va se faire insulter. Il a été de plus ministre sous Buonaparte et traître à ses sermons pendant les Cent-Jours. Voilà comment on devient ministre de la Marine, sans avoir vu d’autre vaisseau que les péniches que Buonaparte faisait construire à Chaillot. Je me trompe beaucoup, ou le peu qu’il est paraîtra au ministère. Je le connais, c’est un écolier, et du moins, je suis juge en capacité… »


Ce 26 septembre 1817. — «… Les ministres vont se renfoncer dans leur système… Quels pauvres diables ! Au reste, je vais arriver avec un ouvrage. Je serai pacifique, si l’on veut, et prêt à attaquer, si enfin on ne veut pas servir la France.

« J’ai une extrême envie de voir la pauvre Mouche : j’ai le cœur déchiré de ce que vous me dites, et j’y pense continuellement. Quand aurons-nous un instant de bonheur et de repos ? »


Ce dimanche matin [28 septembre 1817]. — « Je suis au Roi et à la France. On a fait des fautes, on peut les réparer. J’oublie tout le mal qu’on m’a fait, et si je puis être utile, je suis prêt… »



Ce mercredi 1er octobre [1817]. — «… Tout cela périra, c’est certain : on n’est point criminel ou stupide à ce point impunément. Je ne compte au reste sur rien pour mes affaires particulières : la même politique, qui fait qu’ils ne sentent pas leur position, les empochera de sentir la paix et la prépondérance