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UNE AMITIÉ FÉMINIME DE CHATEAUBIAND

MADAME DE DURAS
LETTRES INÉDITES[1]


La duchesse de Duras avait de l’imagination et un peu même dans le visage de l’expression de Mme de Staël : on a pu juger de son talent d’auteur par Ourika. Rentrée de l’émigration, renfermée pendant plusieurs années dans son château d’Ussé, au bord de la Loire, ce fut dans les beaux jardins de Méréville que j’en entendis parler pour la première fois, après avoir passé auprès d’elle à Londres sans l’avoir rencontrée ; elle vint à Paris pour l’éducation de ses charmantes filles, Félicie et Clara. Des rapports de famille, de province, d’opinions littéraires et politiques m’ouvrirent la porte de sa société. La chaleur de l’âme, la noblesse du caractère, l’élévation de l’esprit, la générosité du sentiment, en faisaient une femme supérieure.


C’est en ces termes que Chateaubriand, dans les Mémoires d’Outre-tombe, nous présente, — il dit bien, — « la femme supérieure » dont la « forte et vive amitié, » vingt années durant, de 1808 à 1828, date de sa mort, a survécu à toutes les épreuves de la vie, à toutes les désillusions de l’expérience, aux froissemens, aux jalousies, aux amertumes et aux injustices qui étaient la monnaie courante des amitiés et des amours de René.

  1. La librairie Perrin va publier prochainement un important volume de M. G. Pailhès sur la Duchesse de Duras et Chateaubriand. M. Pailhès y a utilisé nombre de lettres inédites, — plus de cinq cents, — de Chateaubriand, de Mme de Duras, de Mme de la Tour du Pin, de Talleyrand, de Humboldt, etc. Il a bien voulu me permettre d’y puiser à pleines mains pour l’étude qu’on va lire. Je lui en exprime ici toute ma respectueuse gratitude.